Avis 20221676 Séance du 21/04/2022

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 7 mars 2022, à la suite du refus opposé par le préfet de police de Paris à sa demande de communication, par voie postale à son domicile, à ses frais, à la suite d'une première transmission partielle, afin de comprendre la prise en charge tardive, par la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, le X, de son père, Monsieur X, décédé le X à l’hôpital, du dossier de régulation médicale de celui-ci notamment : 1) la fiche administrative ; 2) la liste des communications ; 3) le dossier de régulation médicale ; 4) la liste des décisions ; 5) l’enregistrement sonore des conversations téléphoniques avec le médecin régulateur. En l'absence, à la date de sa séance, de réponse du préfet de police de Paris, la commission rappelle, en premier lieu, que les documents, quels que soient leurs intitulés, établis par les sapeurs-pompiers à l'occasion de leur mission de lutte contre l’incendie et de secours aux victimes, sont des documents administratifs au sens du livre III du code des relations entre le public et l’administration. Toutefois, en application des dispositions de l'article L311-6 de ce code, ces documents, lorsqu’ils contiennent des mentions dont la communication est de nature à porter atteinte au secret de la vie privée ou au secret médical ou qui feraient apparaître le comportement d'une personne dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice, ne sont communicables qu'à la personne intéressée. Il ressort de la décision du Conseil d'État du 17 avril 2013, n° 337194, mentionnée aux tables du recueil Lebon, que l'intéressé, au sens de cet article, est la personne directement concernée par le document, c'est-à-dire, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication. La commission rappelle, en deuxième lieu, que les documents comportant des informations à caractère médical sont communicables, en application des dispositions combinées des articles L1110-4 et L1111-7 du code de la santé publique, aux ayants droit de la personne décédée qui justifient de leur qualité, lorsque leur demande est motivée par le souci de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir des droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès et dans la seule mesure utile à l'objectif invoqué. La commission souligne à cet effet que si l’objectif relatif aux causes de la mort n’appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d’un document médical. Le demandeur doit ainsi préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu’il souhaite faire valoir, afin de permettre à l’équipe médicale d’identifier le ou les documents nécessaires à la poursuite de l’objectif correspondant. La commission précise, en outre, que l’application de ces dispositions à chaque dossier d’espèce relève de l’équipe médicale qui a suivi le patient décédé, ou, à défaut, d’autres médecins compétents pour apprécier si l’ensemble du dossier médical ou seulement certaines pièces se rattachent à l’objectif invoqué, quel qu’il soit (causes du décès, mémoire du défunt, défense de droits). Il n’appartient pas aux médecins chargés de cet examen du dossier d’apprécier l’opportunité de la communication de tout ou partie du dossier, mais seulement l’adéquation des pièces communiquées aux motifs légaux de communication invoqués par le demandeur. L’établissement peut ainsi être conduit, selon les cas, à transmettre l’ensemble du dossier ou bien à se limiter à la communication des pièces répondant strictement à l’objectif poursuivi. L’équipe médicale n’est, en outre, nullement liée par une éventuelle liste de pièces réclamées par le demandeur. La commission estime enfin que, par ces dispositions, le législateur a clairement entendu restreindre aux seules personnes qui peuvent se prévaloir de la qualité d'ayant droit, à l'exclusion de toute autre catégorie de tiers tels que la famille ou les proches, la dérogation ainsi aménagée au secret médical du défunt. La commission rappelle, en troisième lieu, que les enregistrements sonores des communications téléphoniques passées entre un service de secours et un appelant et au sein d’un service de secours dans le cadre de la mission de lutte contre l’incendie et de secours constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, soumis au droit d'accès garanti par l'article L311-1 de ce code. Ont notamment la qualité de personne intéressée, la personne ayant signalé le fait à l'origine de l'intervention, les personnes secourues et leurs ayants droits, les propriétaires et occupants de l'immeuble dans lequel l'intervention a eu lieu, ainsi que l'employeur de la personne secourue, s'il s'agit d'un accident du travail. Ainsi, un simple témoin qui ne relèverait pas des catégories précédentes n’a pas la qualité de personne intéressée au sens du titre III du code des relations entre le public et l’administration. Lorsque la communication est sollicitée par la personne qui a elle-même passé l’appel au service de secours, l’appelant, la commission estime que l'enregistrement lui est communicable en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration dans la mesure où il ne peut comporter que des informations que l’appelant a lui-même fournies. Lorsque la communication est sollicitée par la personne intéressée autre que l’appelant, en application des dispositions de l'article L311-6 de ce code, lorsque le document contient des mentions qui portent « une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable » ou font apparaître « le comportement d'une personne dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice » ou dont la communication est de nature à porter atteinte au secret de la vie privée ou au secret médical, ces informations ne sont communicables qu'à la personne intéressée. Il appartient donc à l’autorité saisie d’occulter notamment les mentions concernant l’auteur de l’appel (son nom, et numéro de téléphone), et toute mention qui révélerait le comportement de ce dernier, ou d'un tiers, et dont la divulgation pourrait lui porter préjudice. En l'espèce, la commission constate que le demandeur justifie de la qualité d’ayant droit du défunt et déduit de la formulation de sa demande, qu'il cherche à connaître les causes de la mort de son défunt père. Elle émet donc, dans les conditions et sous les réserves précitées, un avis favorable.