Avis 20220285 Séance du 10/03/2022

Communication, par voie électronique, dans le cadre de son activité de généalogie familiale privée, de la liste électorale du département.
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 janvier 2022, à la suite du refus opposé par le préfet de la Charente-Maritime à sa demande de communication, par voie électronique, dans le cadre de son activité de généalogie familiale privée, de la liste électorale du département. La commission rappelle qu'aux termes de l'article L37 du code électoral, dans sa rédaction issue de l'article 7 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 : « Tout électeur peut prendre communication et obtenir copie de la liste électorale de la commune à la mairie ou des listes électorales des communes du département à la préfecture, à la condition de s'engager à ne pas en faire un usage commercial (...) ». Elle rappelle également que la communication des listes électorales est subordonnée à la condition que le demandeur fasse la preuve de sa qualité d'électeur. La commission estime, dans le silence des textes, que la preuve de la qualité d’électeur peut se faire par tout moyen, sans qu’il y ait lieu d’exiger la production d’un titre d’identité ou de la carte d’électeur. Elle considère qu’une attestation sur l’honneur peut suffire, dès lors que le demandeur produit les éléments permettant à l’administration de vérifier l’effectivité de son inscription sur une liste électorale, à savoir ses nom et prénom(s) et le nom de la commune où il allègue être inscrit. La commission rappelle ensuite que le pouvoir réglementaire a subordonné l'exercice du droit d'accès aux listes électorales à l'engagement, de la part du demandeur, de ne pas en faire un usage commercial (cf. décision du Conseil d'État du 2 décembre 2016 n° 388979, au recueil) afin d'éviter toute exploitation commerciale des données personnelles. La commission considère dès lors que l'autorité compétente est fondée à rejeter la demande de communication dont elle est saisie s'il existe, au vu des éléments dont elle dispose, nonobstant l'engagement pris par le demandeur, des raisons sérieuses de penser que l'usage des listes électorales risque de revêtir, en tout ou partie, un caractère commercial. La commission considère que le caractère commercial ou non de l’usage des listes s’apprécie notamment au regard de l’objet de la réutilisation envisagée et de l’activité dans laquelle elle s’inscrit, la forme juridique retenue par le demandeur pour poursuivre cet objectif et l'existence ou l'absence de ressources tirées de cet usage constituant à cet égard de simples indices. A cet effet, la commission estime qu'il est loisible à l'autorité compétente de solliciter du demandeur qu'il produise tout élément d'information de nature à lui permettre de s'assurer de la sincérité de son engagement, de ne faire de la liste électorale qu'un usage conforme aux dispositions de l'article L37 du code électoral. L'absence de réponse à une telle demande peut être prise en compte, parmi d'autres éléments, par l'autorité compétente afin d'apprécier, sous le contrôle du juge, les suites qu'il convient de réserver à la demande dont elle est saisie. La commission précise, par ailleurs, que l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données (RGPD) n'a pas entraîné de modification des dispositions du code des relations entre le public et l'administration relatives au droit d'accès aux documents administratifs comportant des données personnelles, ou des dispositions législatives prévoyant un droit d'accès spécial ainsi que le prévoit d'ailleurs l'article 86 du RGPD aux termes duquel : « Les données à caractère personnel figurant dans des documents officiels détenus par une autorité publique ou par un organisme public ou un organisme privé pour l'exécution d'une mission d'intérêt public peuvent être communiquées par ladite autorité ou ledit organisme conformément au droit de l'Union ou au droit de l'État membre auquel est soumis l'autorité publique ou l'organisme public, afin de concilier le droit d'accès du public aux documents officiels et le droit à la protection des données à caractère personnel au titre du présent règlement. » En l'espèce, la commission relève que la préfecture de la Charente-Maritime, qui a refusé au demandeur la communication des listes électorales sollicitées, fait état de la profession de développeur informatique au sein d'une société ingénierie en informatique, estime que la nature de cette activité, l'activité importante de l'intéressé sur les réseaux sociaux, les demandes multiples de listes électorales déjà effectuées, la confusion sur les motifs de ses demandes et son absence de précision quant à la réutilisation envisagée, par la seule allégation d'une activité de généalogie privée, ainsi que l'ampleur de la présente requête, qui concerne l'ensemble des communes du département, créent un doute sur l'usage qui pourrait être fait des documents. Dans ces conditions, la commission estime que la commune est fondée, en dépit de l'indication par le demandeur du motif de la réutilisation envisagée, compte tenu notamment de la disproportion entre ce motif et l'étendue de la demande de communication (toutes les communes du département), à refuser la communication de la liste sollicité. Elle émet donc un avis défavorable.