Conseil 20220123 Séance du 10/03/2022

Caractère communicable des documents suivants, reçus avant la prise d'un arrêté préfectoral de mise en demeure à l'encontre d'un exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement ayant fait l'objet d'un rapport d'inspection : 1) la réponse apportée par l'exploitant au regard du rapport d'inspection ; 2) les factures justificatives jointes à sa réponse.
La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné, dans sa séance du 10 mars 2022, votre demande de conseil relative au caractère communicable des documents suivants, reçus avant la prise d'un arrêté préfectoral de mise en demeure à l'encontre d'un exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement ayant fait l'objet d'un rapport d'inspection : 1) la réponse apportée par l'exploitant au regard du rapport d'inspection ; 2) les factures justificatives jointes à sa réponse. La commission rappelle que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « / 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1° ; / 3° L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus ; / 4° Les analyses des coûts et avantages ainsi que les hypothèses économiques utilisées dans le cadre des décisions et activités visées au 2° ; / 5° Les rapports établis par les autorités publiques ou pour leur compte sur l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement. » La commission estime que les informations relatives à une installation classée pour la protection de l’environnement sont relatives à l'environnement, au sens de l'article L124-2 du code de l'environnement, notamment sur le fondement du 2° de cet article. Selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l’environnement, le droit de toute personne d'accéder à des informations relatives à l’environnement lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement, au nombre desquelles ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations. Ces informations sont en conséquence communicables à toute personne qui en fait la demande, sous réserve le cas échéant, de l'occultation préalable des mentions relevant des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. La commission souligne à cet égard qu'aux termes du I de l’article L124-4 du code de l’environnement : « après avoir apprécié l’intérêt d’une communication, l’autorité publique peut rejeter la demande d’une information relative à l’environnement dont la consultation ou la communication porte atteinte : / 1°) Aux intérêts mentionnés aux articles L311-5 à L311-8 du code des relations entre le public et l'administration, à l'exception de ceux visés au e et au h du 2° de l'article L311-5 ». Elle estime qu’en vertu de ces dispositions, qui doivent être interprétées à la lumière de celles de la directive 2003/4/CE du 28 janvier 2003 dont elles assurent la transposition en droit national, l’administration peut, après avoir apprécié l’intérêt d’une communication, rejeter une demande tendant à obtenir une information environnementale, au motif que sa communication ferait apparaître le comportement d’une personne physique, dont la divulgation pourrait lui porter préjudice (avis CADA n° 20132830 du 24 octobre 2013). En revanche, elle considère que cette exception, prévue à l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, ne peut être opposée lorsque l’information environnementale se rapporte à l’activité d’une personne morale. Cette information environnementale est, dès lors, non seulement communicable à l’intéressé mais aussi à toute autre personne qui en ferait la demande, sur le fondement des articles L124-1 et suivants du code de l’environnement, lorsqu’elle est détenue, reçue ou établie par les autorités publiques mentionnées à l'article L124-3 du code de l'environnement ou pour leur compte. La commission souligne ensuite qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des « émissions de substances dans l'environnement » que dans le cas où sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce que l'autorité administrative en refuse la communication au motif qu'elles comporteraient des mentions couvertes par le secret des affaires ou le secret de la vie privée. La commission estime, au surplus, que, compte tenu des incidences possibles ou avérées résultant de l'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement, les informations environnementales figurant dans les documents demandés, sont en principe communicables au public, quand bien même ils feraient apparaître le comportement de personnes physiques dans des conditions susceptibles de leur porter préjudice, et sans qu'y fasse par conséquent obstacle la circonstance que l'installation soit exploitée par une personne physique, et non par une personne morale En l'espèce, la commission estime que les documents sollicités, qui sont en votre possession, constituent des documents administratifs qui comportent des informations relatives à des émissions de substances dans l'environnement, tels que l'écoulement d’effluents en dehors des ouvrages de stockage étanches vers le milieu naturel ou la présence de ferrailles aux abords de l'élevage de vaches laitières. En application des principes précédemment exposés, elle considère que ces documents sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et des articles L124-1 et suivants du code de l'environnement sans que le secret des affaires et le secret de la vie privée ne soient opposables. La commission vous invite donc à procéder à la communication des documents en cause, sans disjonction ni occultation.