Avis 20217261 Séance du 13/01/2022
Communication, par courrier électronique ou, à défaut, par voie postale, de la copie de l'échange, dans son intégralité, de courriels électroniques entre Monsieur X, X, et Monsieur X, X, relatifs à la demande de révision du plan local d'urbanisme (PLU) présentée par ses clients.
Maître X, conseil de X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 19 novembre 2021, à la suite du refus opposé par le maire de Breuillet à sa demande de communication, par courrier électronique ou, à défaut, par voie postale, de la copie de l'échange, dans son intégralité, de courriels électroniques entre Monsieur X, X, et Monsieur X, X, relatifs à la demande de révision du plan local d'urbanisme (PLU) présentée par ses clients.
La commission, qui a pris connaissance des observations du maire de Breuillet, relève que les clients du demandeur ont été assignés en référés par le préfet de l'Essonne devant le tribunal judiciaire d'Evry-Couronnes à fin d'expulsion en vue de démolitions de constructions réalisées sans autorisation et en infraction au plan d'occupation des sols. Dans le cadre de cette procédure, trois courriels leur ont été communiqués, le premier, du X, échangé entre l'avocat de la préfecture et Monsieur X, X à la préfecture de l’Essonne, le deuxième, du X, entre Monsieur X et Monsieur X, X de Breuillet et enfin, le dernier, du 16 avril 2021, entre Monsieur X et Monsieur X, X. La commission comprend que ces courriels font suite à la demande de révision du plan local d'urbanisme que les demandeurs ont adressée à la commune de Breuillet et que ces derniers souhaitent obtenir l'intégralité des échanges détenus par le maire de Breuillet que ses services auraient échangés entre eux au sujet de cette demande.
La commission rappelle, en premier lieu, que les courriers électroniques échangés entre des autorités administratives dans le cadre de leur mission de service public revêtent le caractère de document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, soumis au droit d'accès garanti par le livre III de ce code.
La commission précise, en deuxième lieu, que les documents détenus par les juridictions et se rattachant à leur fonction de juger ainsi que les documents inséparables d’une procédure juridictionnelle ne présentent pas un caractère administratif et n'entrent donc pas dans le champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l’administration. Il en va ainsi, notamment des jugements, ordonnances, décisions ou arrêts rendus par les juridictions de l'ordre judiciaire ou administratif. C'est aussi le cas, plus largement, pour les dossiers de demande d'aide judiciaire (CE, 5 juin 1991, Mme X, n° 102627, aux T. p. 948), des décisions du parquet, des dossiers d'instruction, des procès-verbaux d'audition, des rapports d'expertise ou des mémoires et observations des parties - c'est-à-dire de l'ensemble des pièces de procédure proprement dites - mais aussi des documents de travail internes à une juridiction, destinés à leurs membres et concourant à l'instruction des affaires ou à la formation des jugements (CE, 9 mars 1983, SOS Défense et CE, 28 avril 1993, Mme X, n° 117480, T. p. 782). La commission estime, toutefois, que cette qualification de documents juridictionnels ne saurait s'étendre aux documents produits par les autorités administratives et transmis au juge à l'occasion d'un contentieux.
La commission déduit de ces éléments que les documents sollicités revêtent, en l'espèce, un caractère administratif.
La commission indique, en troisième lieu, que le f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que ne sont pas communicables, les documents administratifs dont la communication porterait atteinte « au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente ». Elle souligne, à cet égard, que le Conseil d’État a jugé, dans sa décision du 21 octobre 2016 n° 380504 (aux tables), que si la seule circonstance que la communication d’un document administratif soit de nature à affecter les intérêts d’une partie à une procédure juridictionnelle, ou qu’un document ait été transmis à une juridiction dans le cadre d’une instance engagée devant elle, ne fait pas obstacle à la communication de ces documents, cette communication est en revanche exclue, sauf autorisation donnée par l’autorité judiciaire ou par la juridiction administrative compétente, dans l’hypothèse où elle risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives de cette autorité ou de cette juridiction.
En l'état des informations portées à sa connaissance, la commission estime que la communication des documents demandés n'est pas de nature à porter atteinte au déroulement d'une procédure juridictionnelle.
En quatrième lieu, la commission rappelle que le premier alinéa de l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose : « En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle », les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ».
En application de ces dispositions, le Conseil d'État (CE, Ass. 27 mai 2005, Département de l'Essonne) a jugé que l'ensemble des correspondances échangées entre un avocat et son client, en l’espèce un département, notamment les consultations juridiques rédigées par l'avocat à son intention, sont des documents administratifs couverts par le secret professionnel. Il résulte également de la jurisprudence de la Cour de cassation que le secret professionnel de l’avocat couvre l’ensemble des pièces du dossier ainsi que l’ensemble des correspondances échangées entre l’avocat et son client, y compris celles de ces correspondances qui n’ont pas de rapport direct avec la stratégie de défense – comme la convention d'honoraires, ou les facturations afférentes émises par l’avocat (Cour de cassation, Civ-1, 13 mars 2008, pourvoi n° B05 – 11314).
En l’espèce, la commission relève que la demande porte uniquement sur des échanges entre deux autorités administratives. Elle estime donc que ces documents ne sont pas couverts par le secret professionnel.
En cinquième lieu, la commission considère que les documents demandés sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 de ce code, sous réserve de l'occultation ou de la disjonction préalable, le cas échéant, des mentions couvertes par les secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6 de ce code.
En réponse à la la demande qui lui a été adressée, le maire de Breuillet a informé la commission qu'il ne détenait aucun autre document que les trois courriels déjà communiqués au demandeur. La commission en prend acte et déclare, dès lors, la demande d'avis sans objet. Elle s'étonne cependant, à la lecture des pièces du dossier, qu'aucun autre courriel n'ait été échangé entre les services de la mairie de Breuillet. En effet, de tels documents seraient communicables aux demandeurs et à leur conseil, en application des principes rappelés ci-dessus.