Avis 20213362 Séance du 08/07/2021

Copie de l'ensemble des bulletins de salaire et documents relatifs à la progression de carrière de tous les agents de catégorie B affectés à la médiathèque pour la période courant de 2007 à 2018.
Maître X, conseil de Monsieur X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 18 mai 2021, à la suite du refus opposé par le maire de Blagnac à sa demande de copie de l'ensemble des bulletins de salaire et documents relatifs à la progression de carrière de tous les agents de catégorie B affectés à la médiathèque pour la période courant de 2007 à 2018. En réponse à la demande qui lui a été adressée, le maire de Blagnac a indiqué à la commission qu’elle considérait la demande de Maître X comme abusive. La commission souligne cependant qu'une demande ne peut être considérée comme abusive que lorsqu'elle vise de façon délibérée à perturber le fonctionnement d'une administration. Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne de présenter plusieurs demandes à la même autorité publique ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives. En l'espèce, il ne lui est pas apparu, compte tenu de la nature des documents demandés, laquelle concerne une seule catégorie d'agents d'un service municipal précisément délimité, du destinataire de la demande et des éléments portés à sa connaissance, que cette demande présenterait un caractère abusif. La commission rappelle d'abord que la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens. Elle admet toutefois que les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées. Il en est ainsi, notamment, de la qualité d'agent public, de l'adresse administrative et, s'agissant de la rémunération, des composantes fixes de celle-ci : grade et échelon, indice de traitement, nouvelle bonification indiciaire (NBI), indemnités de sujétion. La commission estime cependant que, si les administrés doivent pouvoir accéder à certains renseignements concernant la qualité de leur interlocuteur, la protection, par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, de la vie privée impose que ces aménagements soient limités à ce qui est strictement nécessaire à leur information légitime. Ainsi, s'agissant des éléments de rémunération, la commission est défavorable à la communication des informations liées, soit à la situation familiale et personnelle (supplément familial), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur la manière de servir de l'agent (primes pour travaux supplémentaires, primes de rendement), ou encore de celles relatives aux horaires de travail, aux indemnités et heures supplémentaires. Il en va de même, pour le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération, dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent. La commission souligne également que le Conseil d’État (CE 24 avril 2013 n° 343024 et CE 26 mai 2014 n° 342339) a précisé que lorsque la rémunération qui figure dans le contrat de travail ou le bulletin de salaire d'un agent public résulte de l'application des règles régissant l'emploi concerné, sa communication à un tiers n'est pas susceptible de révéler sur la personne recrutée une appréciation ou un jugement de valeur, au sens des dispositions de l'article L311-6 du code des relations entre le public et les administrations, mais qu'en revanche, lorsqu'elle est arrêtée d'un commun accord entre les parties sans référence à des règles la déterminant, la rémunération révèle nécessairement une telle appréciation ou un tel jugement de valeur. Dans ce cas, le contrat de travail peut être communiqué après occultation des éléments relatifs à la rémunération, tandis que la communication du bulletin de salaire, qui serait privée de toute portée sans la rémunération, ne peut être opérée. S'agissant des mentions supplémentaires présentes sur le bulletin de paye des agents publics depuis l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, la commission estime ensuite que la mention du taux d'imposition, qui apparaît soit comme un taux personnalisé soit comme un taux « neutre », est susceptible, d'une part, de permettre la révélation d'informations liées à la situation personnelle et familiale de l'agent concerné, notamment par le biais de croisement de ces informations avec d'autres éléments disponibles. D'autre part, le taux d'imposition constitue une information propre à la situation fiscale de l'agent qui relève du champ d'application de l'article L103 du livre des procédures fiscales, dispositions particulières dérogeant au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, et de la vie privée. En conséquence, la commission considère que la mention du taux doit faire l'objet d'une occultation en application du 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. La commission considère qu'il en va de même pour les mentions, qui ne sont que la conséquence arithmétique de l'application de ce taux, du montant qui aurait été versé au salarié en l'absence de retenue à la source, du montant de l'impôt prélevé et du montant net à payer. Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable à la communication des bulletins de salaire sollicités. S'agissant des documents relatifs à la progression de carrière de tous les agents, en réponse à la demande qui lui est adressée, la commune de Blagnac a informé la commission de ce qu’elle n’a pu identifier les actes administratifs visés par la demande. La commission rappelle que le livre III du code des relations entre le public et l’administration ne fait pas obligation à l’administration saisie d’une demande de communication de procéder à des recherches en vue de collecter l'ensemble des documents éventuellement détenus (CE, 27 septembre 1985, Ordres des avocats de Lyon c/ X, recueil page 267). Elle estime que la demande de Maître X est trop imprécise pour permettre à l'administration d'identifier les documents souhaités. Elle ne peut donc que déclarer cette demande irrecevable et inviter le demandeur, s’il le souhaite, à préciser la nature et l’objet de ces documents.