Conseil 20210448 Séance du 11/02/2021

- caractère communicable d’un courrier adressé par la CNIL à une entreprise privée n’exerçant pas de mission de service public aux fins de clôturer une procédure de contrôle ; - les mentions susceptibles de se rattacher à des manquements à la réglementation applicable en matière de protection des données doivent-elles être occultées ? - la circonstance que le traitement contrôlé de l’entreprise soit encore en partie à l’état de projet ne devrait-il pas inviter à retenir une application extensive du secret des affaires et considérer que le document en relèverait dans son intégralité ?
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 11 février 2021 votre demande de conseil relative au caractère communicable d’un courrier adressé par la Commission nationale de l'informatique et des libertés à une entreprise privée n’exerçant pas de mission de service public aux fins de clôturer une procédure de contrôle. La commission rappelle qu'aux termes de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, ne sont pas communicables aux tiers, les mentions dont la communication porterait atteinte au secret des affaires, lequel comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles (1°) ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice (3°). La commission précise, d'une part, que pour l'application de cette dernière réserve, la commission distingue le rappel de la réglementation en vigueur des constats de manquement à ladite réglementation. Seuls ces derniers, susceptibles de révéler un comportement dont la divulgation porterait préjudice à son auteur, ne sont pas communicables aux tiers en application des dispositions du 3° de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, sauf s’il s’agit d’informations relatives à l’environnement (CE, n° 392711, Union départementale CGT d’Ille-et-Vilaine, 21 octobre 2016 ; avis 20132830 du 24 octobre 2013). D'autre part, pour l'appréciation de l'atteinte au secret des affaires, il y a lieu de tenir compte de la communication publique à laquelle la société a elle-même procédé, une information ne relevant du secret des affaires qu’en tant qu’elle demeure secrète (avis 20183478 du 21 mars 2019). En l'espèce, la commission relève, en premier lieu, que le courrier de fin de procédure de contrôle ne relève aucun manquement en tant que tel, mais apporte des conseils et des recommandations et souligne les difficultés qui doivent être évitées (choix de la base légale, âge du public cible initialement choisi et évolution et protection adaptée ; modalité de retrait du consentement). Elle estime que ces remarques, intervenues dans le contexte d’un projet en cours de définition et de finalisation compte tenu des discussions en cours avec l'instance de régulation, ne font pas apparaître un comportement dont la divulgation pourrait porter préjudice à la société contrôlée. En revanche, relève de cette exception, la dernière phrase de la page 2, qui fait état d’une plainte dont a été saisie la CNIL concernant le projet développé par la société. En second lieu, la commission, qui rappelle qu'il lui revient de statuer sur la pertinence des occultations, non à la date à laquelle les documents ont été établis mais à celle du refus de communication (CE, 20 janvier 2019, Association Rassemblement National, n° 420467, aux Tables), constate que les dirigeants de la société contrôlée ont communiqué publiquement sur leur projet (https://tadata-france.fr/bons-plans-jeunes/ ou https://www.jaimelesstartups.fr/tadata-appli-vente-donnees-personelles/), qui repose sur la monétisation des données à caractère personnel des personnes âgées de 12 à 25 ans inscrites à son service auprès de partenaires commerciaux. Le projet et son modèle économique ne sont donc plus confidentiels. A la lumière des informations ainsi disponibles, il apparaît à la commission que seuls relèvent du secret des affaires, le troisième paragraphe du courrier commençant par « A titre liminaire », l’incise « dans la mesure où le service (…) national » du septième paragraphe qui sont relatifs au déploiement du service en France, ainsi que la seconde phrase du sixième paragraphe de la troisième page du courrier relative aux liens contractuels avec les annonceurs. La commission considère, en dernier lieu, que la communication du document occulté des mentions qui viennent d'être précisées n'est pas dépourvue d'intérêt et que ce dernier est donc communicable sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l'administration.