Avis 20203460 Séance du 19/11/2020
Communication de l'entier dossier pénitentiaire de Monsieur X, fils de ses clients, décédé le X au quartier disciplinaire du centre de détention de X, comprenant notamment :
1) son dossier disciplinaire ;
2) son dossier médical ;
3) ses activités (parloirs, travail, formations, ateliers) ;
4) ses dossiers de placement au quartier disciplinaire (QD) et au quartier d'isolement (QI) ;
5) les observations GENESIS.
Maître X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 12 août 2020, à la suite du refus opposé par le garde des sceaux, ministre de la justice à sa demande de communication de l'entier dossier pénitentiaire de Monsieur X, fils de ses clients, décédé le X au quartier disciplinaire du centre de détention de X, comprenant notamment :
1) son dossier disciplinaire ;
2) son dossier médical ;
3) ses activités (parloirs, travail, formations, ateliers) ;
4) ses dossiers de placement au quartier disciplinaire (QD) et au quartier d'isolement (QI) ;
5) les observations GENESIS.
En premier lieu, la commission considère que les documents sollicités, composant le dossier pénitentiaire d'une personne détenue, constituent des documents administratifs en application de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. La commission relève qu'aux termes de l'article L311-6 de ce code, « ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée (...) ». Il ressort de la décision du Conseil d'État du 17 avril 2013, ministre de l'immigration nationale et du développement solidaire c/ M. X (n° 337194, mentionnée aux tables du recueil Lebon), que l'intéressé, au sens de ces dispositions, est la personne directement concernée par le document, c'est-à-dire, ainsi que les conclusions du rapporteur public sur cette affaire permettent de le comprendre, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit ou d'un motif légitime dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication.
S'agissant d'une personne décédée, la commission estime que des documents peuvent être communiqués aux ayants droit du défunt, sous réserve que le défunt ne s'y soit pas opposé de son vivant et que l'ayant droit se prévale d'un droit à raison du ou des documents dont il demande la communication. Tel peut être le cas lorsque les ayants droit cherchent à faire valoir leurs droits, à défendre la mémoire du défunt ou à connaître les causes du décès. La communication est alors possible dans la seule mesure où ces documents sont nécessaires à la poursuite de l'objectif évoqué.
En second lieu, la commission rappelle, d'une part, que les dispositions du f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration font obstacle à la communication de documents dans l'hypothèse où celle-ci est de nature à porter atteinte « au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente » et, d'autre part, que si la seule circonstance que la communication d’un document administratif soit de nature à affecter les intérêts d’une partie à une procédure juridictionnelle, ou qu’un document ait été transmis à une juridiction dans le cadre d’une instance engagée devant elle, ne fait pas obstacle à la communication de ces documents, est en revanche exclue la communication des documents administratifs, sauf autorisation donnée par l’autorité judiciaire ou par la juridiction administrative compétente, dans l’hypothèse où cette communication risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives de cette autorité ou de cette juridiction (CE, 21 octobre 2016 n° 380504). Il appartient, dans cette hypothèse, à l’autorité saisie d’une demande de communication de ce document, de déterminer, à la date à laquelle elle se prononce, à moins que l’autorité judiciaire compétente ait donné son accord, si la communication du document sollicité est de nature à porter atteinte au déroulement de procédures juridictionnelles ou d’opérations préliminaires à de telles procédures en empiétant sur les prérogatives de cette autorité.
En réponse à la demande, qui lui a été adressée, le garde des sceaux, ministre de la justice a indiqué à la commission que le décès de Monsieur X faisait l'objet d'une enquête diligentée par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de X. La commission en prend note mais considère que les documents composant le dossier sollicité conservent, compte tenu de ce qui précède, un caractère administratif. Elle invite donc le garde des sceaux, ministre de la justice à apprécier si la communication des documents sollicités est de nature à porter atteinte au déroulement de procédures juridictionnelles ou d'opérations préliminaires à de telles procédures en empiétant sur les prérogatives de cette autorité, avant, le cas échéant, de procéder à la communication aux clients de Maître X, parents du détenu, dont la commission comprend qu'ils cherchent à comprendre les causes et les circonstances du décès de leur fils. Elle émet donc un avis favorable à la communication des pièces du dossier pénitentiaire répondant à cet objectif sous la réserve précitée.