Avis 20201664 Séance du 10/09/2020
Communication de la demande d'exploitation de parcelles dont sa cliente est nu-propriétaire, acceptée par l'administration et signée, prétendument, par la nu-propriétaire.
Maître X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 mai 2020, à la suite du refus opposé par le directeur départemental des territoires de la Marne à sa demande de communication de la demande d'autorisation d'exploitation de parcelles dont sa cliente est nu-propriétaire, acceptée par l'administration et signée, prétendument, par la nu-propriétaire.
La commission, qui a pris connaissance des observations du directeur départemental des territoires de la Marne, rappelle qu’aux termes du I de l’article L331-2 du code rural et de la pêche maritime, sont soumises à autorisation préalable, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles ainsi que, quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles ayant pour conséquence, notamment, de supprimer une exploitation agricole dont la superficie excède le seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles ou de ramener la superficie d'une exploitation en deçà de ce seuil, de priver une exploitation agricole d'un bâtiment essentiel à son fonctionnement, sauf s'il est reconstruit ou remplacé, ainsi que les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole dont les membres répondent à des conditions de capacité ou de qualification professionnelles ou de revenus.
La commission précise, en outre, qu'aux termes des dispositions combinées des articles R331-3 et R331-4 de ce code, les demandes d'autorisation d'exploitation agricole, qui sont instruites par l'autorité préfectorale, sont établies selon un modèle défini par le ministre de l'agriculture et sont accompagnées des éléments justificatifs dont la liste est annexée à ce modèle. Si le bien concerné n'appartient pas au demandeur, celui-ci doit informé par écrit le propriétaire de sa candidature. Aux termes de l'article D331-4-1 dudit code : « (...) Les demandes d'autorisation d'exploiter sont affichées pendant un mois à la mairie des communes où sont situés les biens qui font l'objet de la demande et publiées sur le site de la préfecture chargée de l'instruction. (...) ». Enfin, aux termes du III de l'article R331-6 du code rural et de la pêche maritime, le préfet notifie la décision prise sur les demandes d'autorisation d'exploiter aux demandeurs, aux propriétaires et aux preneurs en place par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé. Cette décision fait l'objet d'un affichage à la mairie de la commune sur le territoire de laquelle sont situés les biens et est publiée au recueil des actes administratifs. A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier ou, en cas de prorogation de ce délai, dans les six mois à compter de cette date, l'autorisation est réputée accordée. En cas d'autorisation tacite, une copie de l'accusé de réception de la demande d'exploitation est affichée et publiée dans les mêmes conditions que l'autorisation expresse ».
La commission rappelle ensuite que les documents administratifs sont en principe communicables à toute personne qui en fait la demande. Toutefois, en vertu de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs et mentions susceptibles de porter atteinte à la protection de la vie privée, portant un jugement de valeur ou une appréciation sur une personne physique nommément désignée ou facilement identifiable ou révélant le comportement d'une tierce personne dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice. La personne intéressée, au sens de ces dispositions, est celle qui est directement concernée par le document, c'est-à-dire, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication.
En l'espèce, la commission relève que les personnes adressant aux services préfectoraux une demande d'autorisation d'exploitation agricole doivent informer par écrit le propriétaire des terres qu'ils envisagent d'exploiter conformément aux dispositions précitées. Elle souligne en outre que les demandes d'autorisation d'exploiter et les décisions préfectorales statuant sur ces demandes font l'objet de mesures de publicité particulière, prévues par ces mêmes dispositions. La commission estime en revanche qu’un dossier de demande d’autorisation d'exploitation agricole peut comporter des informations couvertes par le secret de la vie privée du demandeur, tenant à son identification, sa situation maritale et familiale, ses qualifications et sa situation sociale ainsi que par le secret des affaires en ce qu’il comporte des éléments susceptibles de révéler la stratégie commerciale du bénéficiaire, tels que la description des biens détenus par l’exploitant ou les caractéristiques de l’exploitation. Elle considère en conséquence que si un tel dossier peut être transmis à l'intéressé sur le fondement de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, il ne peut en revanche pas faire l'objet d'une communication à un tiers, y compris au propriétaire ou au nu-propriétaire de ces parcelles, en raison de la présence de trop nombreuses mentions dont la divulgation porterait atteinte à la vie privée ou au secret des affaires, et quand bien-même ce dernier suspecterait l'existence d'une infraction de faux et usage de faux.
La commission émet, en conséquence, un avis défavorable à la demande.