Avis 20201361 Séance du 10/09/2020
Communication de l’intégralité du dossier médical de sa mère décédée, Madame X, afin d’évaluer la prise en charge dont elle a bénéficié pendant son parcours médical, notamment communication des notes internes du réseau de santé polyvalent LYRE consignant les échanges et la coordination réalisée avec les différents professionnels et établissements de santé, les établissements médico-sociaux, et l’entourage et la famille.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 30 mars 2020, à la suite du refus opposé par la directrice du réseau de santé polyvalent LYRE à sa demande de communication de l’intégralité du dossier médical de sa mère décédée, Madame X, afin d’évaluer la prise en charge dont elle a bénéficié pendant son parcours médical, notamment communication des notes internes du réseau de santé polyvalent LYRE consignant les échanges et la coordination réalisée avec les différents professionnels et établissements de santé, les établissements médico-sociaux, et l’entourage et la famille.
En premier lieu, la commission relève qu’en application L6321-1 du code de la santé publique, les « réseaux de santé ont pour objet de favoriser l'accès aux soins, la coordination, la continuité ou l'interdisciplinarité des prises en charge sanitaires, notamment de celles qui sont spécifiques à certaines populations, pathologies ou activités sanitaires. Ils assurent une prise en charge adaptée aux besoins de la personne tant sur le plan de l'éducation à la santé, de la prévention, du diagnostic que des soins. Ils peuvent participer à des actions de santé publique. Ils procèdent à des actions d'évaluation afin de garantir la qualité de leurs services et prestations ». En application de ces mêmes dispositions, ces réseaux de santé sont « constitués entre les professionnels de santé libéraux, les médecins du travail, des établissements de santé, des groupements de coopération sanitaire, des centres de santé, des institutions sociales ou médico-sociales et des organisations à vocation sanitaire ou sociale, ainsi qu'avec des représentants des usagers ». L’article D6321-1 du même code prévoit que ces réseaux de santé « peuvent bénéficier de subventions de l'Etat et des collectivités territoriales ainsi que de financements de l'assurance maladie, notamment du fonds d'intervention régional mentionné à l'article L1435-8, sous réserve de satisfaire aux conditions définies par les articles D6321-2 à D6321-6 ». En application des articles L1435-8 et R1435-16 de ce code, le fonds d’intervention régional, géré par l’agence régionale de santé, participe au financement des réseaux de santé. Enfin, les réseaux de santé bénéficiant des financements mentionnés à l’article D6321-1 transmettent chaque année aux représentants des organismes qui leur ont accordé ces financements « un rapport d'activité relatif à l'année précédente comportant des éléments d'évaluation ainsi qu'un bilan financier et les documents comptables s'y rapportant », rapport qui « précise les résultats obtenus au regard du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens conclu entre le réseau et l'agence régionale de santé »
La commission constate que le réseau Lyre, réseau de santé constitué sous la forme d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901, qui associe notamment les Hospices civils de Lyon, est financé par l’agence régionale de santé et est dédié, selon les informations figurant sur son site internet, à la coordination de parcours de santé complexes qui s’adresse aux professionnels de premier recours face à des situations rencontrées dans leur exercice. Il a notamment pour mission de faciliter la coordination de parcours patients adultes, s’agissant du retour et du maintien à domicile, du suivi de parcours spécifiques en matière de maladies chroniques, d’addictions, de gérontologie, d’oncologie et de soins palliatifs.
La commission estime ainsi au regard des missions assurées par le réseau Lyre, des conditions de sa création et de ses modalités de financement, que le réseau Lyre est chargé d’une mission de service public en matière de prise en charge des parcours de santé complexe. La commission déduit de ces éléments que les documents qui se rapportent à cette mission de service public constitue des documents administratifs au sens des dispositions précitées de l'article L300-2 de ce code, soumis au droit d'accès garanti par le livre III de ce code.
En second lieu, la commission rappelle qu'en application des dispositions combinées des articles L1110-4 et L1111-7 du code de la santé publique, telles que le Conseil d'État les a interprétées, les informations médicales concernant une personne décédée sont communicables à ses ayants droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité sous réserve que cette demande se réfère à l'un des trois motifs prévus à l'article L1110-4 - à savoir connaître les causes du décès, faire valoir leurs droits ou défendre la mémoire du défunt, dans la mesure strictement nécessaire au regard du ou des objectifs poursuivis et à condition que le patient ne s'y soit pas opposé de son vivant. Ces dispositions n'instaurent donc au profit des ayants droit d'une personne décédée qu'un droit d'accès limité à certaines informations médicales, et non à l’entier dossier médical.
La commission précise ensuite que l’application de ces dispositions à chaque dossier d’espèce relève de l’équipe médicale qui a suivi le patient décédé, ou, à défaut, d’autres médecins compétents pour apprécier si l’ensemble du dossier médical ou seulement certaines pièces se rattachent à l’objectif invoqué, quel qu’il soit (causes du décès, mémoire du défunt, défense de droits). Il n’appartient pas aux médecins chargés de cet examen du dossier d’apprécier l’opportunité de la communication de tout ou partie du dossier, mais seulement l’adéquation des pièces communiquées aux motifs légaux de communication invoqués par le demandeur. L’établissement peut ainsi être conduit, selon les cas, à transmettre l’ensemble du dossier ou bien à se limiter à la communication des pièces répondant strictement à l’objectif poursuivi. L’équipe médicale n’est, en outre, nullement liée par une éventuelle liste de pièces réclamées par le demandeur.
A cette fin, la commission souligne que si l’objectif relatif aux causes de la mort n’appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d’un document médical. Le demandeur doit ainsi préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu’il souhaite faire valoir, afin de permettre à l’équipe médicale d’identifier le ou les documents nécessaires à la poursuite de l’objectif correspondant.
La commission, qui prend note de la réponse de la directrice du réseau de santé polyvalent LYRE à la demande qui lui a été adressée, précise que la circonstance que les notes détenues par ce réseau, consignant les échanges et la coordination réalisée avec les différents professionnels et établissements de santé, les établissements médico-sociaux, et l’entourage et la famille de la défunte, soient des notes purement internes et ne feraient pas partie du dossier médical de cette dernière ne saurait faire obstacle par principe à leur communication, dès lors que l’article L1111-7 du code de la santé publique vise « l'ensemble des informations concernant [la] santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé ».
La commission observe toutefois que si la qualité d’ayant-droit de Monsieur X n’est pas contestée, il n'indique pas le ou les objectifs qu'il poursuit. La commission ne peut, dès lors, en l'état, qu'émettre un avis défavorable à la demande. Elle précise qu'une fois cet objectif précisé, les informations contenues dans le dossier médical de la défunte se rapportant à l'objectif poursuivi, lui seront communicables, sous les réserves et selon les modalités précitées.