Avis 20200889 Séance du 02/04/2020

Communication de toutes les informations, conformément aux articles L124-1 et suivants du code de l'environnement, ayant ou non servi dans le cadre des plans régionaux santé environnement (PRSE), relatives aux pesticides, à leur vente, à leur utilisation, etc. avec les résidus dans l'air, dans l'eau (avant et après traitement), dans les sols, pour ce qui concerne le département de l'Aude.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 octobre 2019, à la suite du refus opposé par le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement Occitanie à sa demande de communication de toutes les informations, conformément aux articles L124-1 et suivants du code de l'environnement, ayant ou non servi dans le cadre des plans régionaux santé environnement (PRSE), relatives aux pesticides, à leur vente, à leur utilisation, etc. avec les résidus dans l'air, dans l'eau (avant et après traitement), dans les sols, pour ce qui concerne le département de l'Aude. En l’absence de réponse du directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement Occitanie à la date de sa séance, la commission rappelle, tout d’abord, que, selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l'environnement, le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues, reçues ou établies par l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les établissements publics, ou par les personnes chargées d'une mission de service public en rapport avec l'environnement, dans la mesure où ces informations concernent l'exercice de leur mission, s'exerce dans les conditions définies par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. Aux termes de l’article L124-2 du même code, est considérée comme information relative à l'environnement « toute information disponible, quel qu'en soit le support, qui a pour objet : / 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1° ; / 3° L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus ; / 4° Les analyses des coûts et avantages ainsi que les hypothèses économiques utilisées dans le cadre des décisions et activités visées au 2° ; / 5° Les rapports établis par les autorités publiques ou pour leur compte sur l'application des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement. » Toutefois, en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code de l'environnement, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des émissions de substances dans l'environnement que dans le cas où sa consultation ou sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. En outre, l'article L124-8 du code de l'environnement fait obligation aux autorités administratives d'assurer la diffusion publique des informations relatives à l'environnement dont la liste est fixée par décret. L'article R124-5 du même code, pris en application de l'article L124-8, précise que « doivent faire l'objet d'une diffusion publique les catégories d'informations relatives à l'environnement suivantes : (...) / 7° (...) les évaluations de risques concernant les éléments de l'environnement mentionnés à l'article L124-2. (…). » La commission rappelle, ensuite, que les dispositions des articles L124-1 à L124-8 du code de l’environnement doivent être lues à la lumière des dispositions de la directive 2003/4/CE précitée, dont elles assurent la transposition. La directive prévoit au paragraphe 2 de son article 4 que les États membres peuvent prévoir qu'une demande d'informations environnementales peut être rejetée, notamment, lorsque la divulgation des informations porterait atteinte à la confidentialité des données à caractère personnel et/ou des dossiers concernant une personne physique si cette personne n'a pas consenti à la divulgation de ces informations au public, dans l’hypothèse où la confidentialité de ce type d'information est prévue par le droit national ou le droit de l'Union européenne, et lorsque cette divulgation porterait atteinte à la confidentialité des informations commerciales ou industrielles, dans l’hypothèse où cette confidentialité est prévue par le droit national ou communautaire afin de protéger un intérêt économique légitime, y compris l'intérêt public lié à la préservation de la confidentialité des statistiques et du secret fiscal. Le dixième alinéa de ce même paragraphe 2, prévoit toutefois que les motifs de refus visés au paragraphe 2 sont interprétés de manière restrictive, en tenant compte dans le cas d'espèce de l'intérêt que présenterait pour le public la divulgation de l'information. Dans chaque cas particulier, l'intérêt public servi par la divulgation est mis en balance avec l'intérêt servi par le refus de divulguer. Il précise en outre que les États membres ne peuvent prévoir qu'une demande soit rejetée en vertu du paragraphe 2, points a), d), f), g) et h), lorsqu’elle concerne des informations relatives à des émissions dans l'environnement. Les dispositions de droit national pertinentes au regard de cette directive sont fixées aux 1° et 3° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration et à l'article L312-1-2 du même code, en tant qu'il prévoit le respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Il s'ensuit qu'à la lumière de la directive, la commission estime que les dispositions du II de l’article L124-5 du code de l’environnement doivent être interprétées comme permettant la divulgation d’informations relatives à des émissions de substance dans l’environnement ayant trait à la vie privée des tiers et à la confidentialité des informations commerciales et industrielles, et en déduit qu’elles constituent une disposition législative contraire pour l’application du premier alinéa de l’article L312-1-2 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les informations relatives à l'environnement qui n’ont pas trait à de telles émissions doivent faire l'objet d'un traitement permettant d'occulter les mentions relevant de la vie privée des personnes physiques ou morales ainsi que de la confidentialité au regard des informations commerciales ou industrielles et de rendre impossible l'identification des personnes physiques et des données à caractère personnel, à moins que, à l'issue d'une mise en balance, l'autorité administrative conclue à un intérêt public supérieur de l'accès du public à l'ensemble des informations. Enfin, s'agissant de la notion d'« émissions dans l'environnement », la commission constate que, par deux arrêts C-673/13 et C-442/14 du 23 novembre 2016, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé que, pour l'application de la directive précitée, il y avait lieu d'interpréter ses dispositions à l'aune de sa finalité, qui est de garantir le droit d’accès aux informations concernant des facteurs, tels que les émissions, qui ont ou sont susceptibles d’avoir des incidences sur les éléments de l’environnement, notamment sur l’air, l’eau et le sol et de permettre au public de vérifier si les émissions, rejets ou déversements ont été correctement évalués et de raisonnablement comprendre la manière dont l’environnement risque d’être affecté par lesdites émissions. Cette notion vise ainsi les informations qui « ont trait à des émissions dans l’environnement », c’est-à-dire celles qui concernent ou qui sont relatives à de telles émissions, et non les informations présentant un lien, même direct, avec les émissions dans l’environnement. Par son arrêt C-442/14 du 23 novembre 2016, la même Cour a précisé que les indications concernant la nature, la composition, la quantité, la date et le lieu effectif ou prévisible, des émissions dans l'environnement ainsi que les données relatives aux incidences, à plus ou moins long terme, de ces émissions sur l'environnement, en particulier les informations relatives aux résidus présents dans l'environnement après l'application du produit en cause et les études portant sur le mesurage de la dérive de la substance lors de cette application, que ces données soient issues d'études réalisées en tout ou partie sur le terrain, d'études en laboratoire ou d'études de translocation relèvent de cette même notion. En l'espèce, la commission estime que la demande porte sur des informations relatives à l'environnement ainsi que des informations relatives à des émissions de substances dans l'environnement. Elle émet par suite un avis favorable à la demande, sous les réserves applicables à la catégorie à laquelle l'information appartient telles qu'elles viennent d'être rappelées.