Avis 20200414 Séance du 30/06/2020
Communication, afin de connaître les causes de la mort et de défendre la mémoire de la défunte, sur le fondement de l'article L1110-4 du code de la santé publique, de l'intégralité du dossier médical de sa mère, Madame X, décédée le X.
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 23 janvier 2020, à la suite du refus opposé par la directrice de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes de Salève-Glières à sa demande de communication, afin de connaître les causes de la mort et de défendre la mémoire de la défunte, sur le fondement de l'article L1110-4 du code de la santé publique, de l'intégralité du dossier médical de sa mère, Madame X, décédée le X.
En premier lieu, la commission rappelle qu'aux termes de l'article L311-14 du code des relations entre le public et l’administration, « toute décision de refus d'accès aux documents administratifs est notifiée au demandeur sous la forme d'une décision écrite motivée comportant l'indication des voies et délais de recours » et qu'aux termes de l'article R343-1 du même code, l'intéressé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification du refus ou de l'expiration du délai d'un mois à compter de la réception de la demande par l'administration compétente pour saisir la Commission d'accès aux documents administratifs. Elle souligne également d'une part, que le non-respect du délai de deux mois de saisine de la commission a pour conséquence l'irrégularité de la procédure et donc l’irrecevabilité ensuite d’un éventuel recours contentieux (CE, sect., 25 juillet 1986, X, n° 34278, p. 215) et d'autre part, que ce délai se décompte comme en matière contentieuse, soit deux mois à compter de la date de notification effective de la décision de refus si elle comporte la mention de la possibilité de saisir la commission et du délai de saisine, soit trois mois à compter de l'accusé de réception de la demande de communication par l'administration, sous réserve que cet accusé de réception comporte les mêmes indications. Enfin, la commission précise qu'il appartient à l’administration qui souhaite opposer une tardiveté de la saisine de la commission de l’établir.
En l'espèce, la preuve de la tardiveté alléguée n'étant pas apportée par la seule évocation du délai écoulé entre la date du courrier de refus et celle de la saisine de la commission, alors par ailleurs que la décision de refus de communication du 29 mai 2019 ne comporte pas la mention des délais de saisine de la commission, la demande d'avis est recevable.
En second lieu, la commission rappelle que le dernier alinéa de l’article L1110-4 du code de la santé publique, auquel renvoie l’article L1111-7 du même code, prévoit que le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations médicales concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire opposée par la personne avant son décès.
La commission précise que le Conseil d’Etat, dans une décision du 26 septembre 2005, Conseil national de l’ordre des médecins, n° 270234, a interprété ces dispositions comme ayant entendu autoriser l’accès des ayants droit aux seules informations nécessaires à l’objectif qu’ils poursuivent. Il appartient dès lors au demandeur de spécifier à l’établissement de santé l’objectif poursuivi par la demande de communication du dossier médical du patient décédé, sans que l’établissement n’ait à mener d’investigations sur la réalité du motif invoqué.
La commission souligne à cet effet que si l’objectif relatif aux causes de la mort n’appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d’un document médical. Le demandeur doit ainsi préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu’il souhaite faire valoir, afin de permettre à l’équipe médicale d’identifier le ou les documents nécessaires à la poursuite de l’objectif correspondant.
La commission souligne que l’application de ces dispositions à chaque dossier d’espèce relève de l’équipe médicale qui a suivi le patient décédé, ou, à défaut, d’autres médecins compétents pour apprécier si l’ensemble du dossier médical ou seulement certaines pièces se rattachent à l’objectif invoqué, quel qu’il soit (causes du décès, mémoire du défunt, défense de droits). Il n’appartient pas aux médecins chargés de cet examen du dossier d’apprécier l’opportunité de la communication de tout ou partie du dossier, mais seulement l’adéquation des pièces communiquées aux motifs légaux de communication invoqués par le demandeur. L’établissement peut ainsi être conduit, selon les cas, à transmettre l’ensemble du dossier ou bien à se limiter à la communication des pièces répondant strictement à l’objectif poursuivi. L’équipe médicale n’est, en outre, nullement liée par une éventuelle liste de pièces réclamées par le demandeur.
La commission constate, en l'espèce, que l'établissement a procédé à la communication le 2X des éléments du dossier médical de la défunte, sélectionnés par le médecin coordonnateur, se rapportant aux causes de la mort, notamment les ordonnances, comptes rendus d’hospitalisation, résultats d’analyse médicale. La commission considère que les documents ainsi produits apportent effectivement des informations sur l'état de santé de la patiente avant son décès et sur les causes de celui-ci. La commission, qui rappelle que les ayant-droits des personnes décédées ne disposent pas, sur le fondement des dispositions du code de la santé publique rappelées ci-dessus, d'un droit absolu à la communication de l'intégralité du dossier médical, émet dans ces conditions un avis défavorable à la demande sur ce point.
La commission observe, par ailleurs, que l'objectif visant à défendre la mémoire de la défunte doit être précisé pour permettre à l’établissement de sélectionner les pièces du dossier médical nécessaires à la poursuite de cet objectif. Elle invite en conséquence la demanderesse à préciser sa demande sur ce point.
Le présent avis est rendu au nom de la commission, par délégation donnée à son président en vertu des articles L341-1 et R341-5-1 du code des relations entre le public et l'administration.