Conseil 20191986 Séance du 06/06/2019

Caractère communicable d'une thèse de doctorat au regard des caractéristiques qu'elle présente comme à la fois une une œuvre de l'esprit, un document administratif et une archive publique, notamment: 1) le régime juridique applicable ou bien l'articulation des 3 dispositions relatives au code de la propriété intellectuelle, au code des relations entre le public et l'administration, ou code du patrimoine pour définir le délai de confidentialité d'une thèse ; 2) la durée maximale de cette confidentialité ; 3) le texte de référence permettant de motiver la confidentialité d'une thèse sachant que l'arrêté ministériel en vigueur ne le précise pas.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné, lors de sa séance du 6 juin 2019, votre demande de conseil relative au caractère communicable, eu égard aux dispositions du code des relations entre le public et l'administration, du code de la propriété intellectuelle et du code du patrimoine, des thèses de doctorat présentant « un caractère de confidentialité avéré », au sens de l'arrêté du 25 mai 2016, fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat. La commission relève qu'en application de l'article 12 de l'arrêté du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat, le directeur de thèse et le doctorant signent, lors de l'inscription de celui-ci en première année de doctorat, une convention de formation, qui mentionne notamment « les objectifs de valorisation des travaux de recherche du doctorant : diffusion, publication et confidentialité, droit à la propriété intellectuelle selon le champ du programme de doctorat ». Le premier alinéa de l'article 19 de cet arrêté précise que : « La soutenance est publique, sauf dérogation accordée à titre exceptionnel par le chef d'établissement si le sujet de la thèse présente un caractère de confidentialité avéré ». Enfin, le dernier alinéa de l'article 25 du même arrêté dispose que : « Sauf si la thèse présente un caractère de confidentialité avéré, sa diffusion est assurée dans l'établissement de soutenance et au sein de l'ensemble de la communauté universitaire. La diffusion en ligne de la thèse au-delà de ce périmètre est subordonnée à l'autorisation de son auteur, sous réserve de l'absence de clause de confidentialité ». La commission constate toutefois qu'elle n'a pas été rendue compétente pour interpréter ces dispositions qui instaurent un régime particulier de communication des thèses de doctorat au sein de la communauté universitaire. Elle ne peut donc répondre à votre demande d'interprétation des dispositions en cause. Toutefois, la commission estime que ces dispositions, de valeur réglementaire, ne font pas obstacle à l'application des dispositions législatives des articles L300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, qui garantissent le principe de la liberté d'accès aux documents administratifs. Aux termes de l'article L300-2 de ce code, sont considérés comme tels, « quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission ». La commission considère que les thèses détenues par l'établissement public d'enseignement supérieur dans lequel la soutenance a lieu doivent être regardées comme des documents administratifs au sens des dispositions précitées de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors qu'elles ont été remises à l'établissement dans le cadre de ses missions de service public. Le droit d'accès à ces documents relève donc, également, des dispositions des articles L300-1 et suivants de ce code. En application de ces dispositions, une thèse de doctorat est communicable à toute personne qui en fait la demande en application des dispositions de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration lorsqu'elle est achevée, c'est-à-dire qu'elle a été soutenue devant un jury et, dans le cas où celui-ci a demandé des corrections, lorsque celles-ci ont été apportées ou à l'issue du délai de trois mois imparti pour déposer la thèse corrigée, sous réserve de l'occultation préalable, en application de l'article L311-7 du même code, des mentions relevant des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, sauf à ce que ces occultations privent d'intérêt la communication. Les mentions ainsi protégées ne deviendront librement communicables que dans les délais prévus par le code du patrimoine à l'article L213-2. Une consultation anticipée par dérogation à ces délais peut toutefois être accordée dans le cadre des dispositions de l'article L213-3 du même code aux personnes qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation de ces documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. La commission rappelle, enfin, qu'aux termes de l'article L311-4 du code des relations entre le public et l'administration : « Les documents administratifs sont communiqués ou publiés sous réserve des droits de propriété littéraire et artistique ». Il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées par le Conseil d'Etat, (CE, n° 375704, 8 novembre 2017) qu'un document administratif grevé de droits de propriété intellectuelle qui n'a pas déjà fait l'objet d'une divulgation, au sens de l'article L121-2 du code de la propriété intellectuelle, ne peut être communiqué sans l'autorisation de l'auteur. La commission estime, s'agissant des thèses de doctorat communicables aux termes des dispositions du code des relations entre le public et l'administration mentionnées au précédent alinéa, que le dépôt de la version validée de la thèse dans ses formats de diffusion et d'archivage par l'établissement de soutenance auprès de l'Agence bibliographique de l'enseignement supérieur, qui est précédé de l'enregistrement d'autorisations de diffusion dans le cadre du bordereau d'enregistrement national, le cas échéant assorti d'un contrat de diffusion, dans les conditions fixées par l'arrêté du 25 mai 2016, implique de la part de son auteur l'exercice de son droit de divulgation. La commission en déduit qu'il n'est donc pas nécessaire de recueillir l'accord de l'auteur d'une thèse universitaire avant sa communication sur le fondement du titre I du livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il appartient en revanche à l'administration d'informer le demandeur que la réutilisation d'un tel document ne relève pas du titre II du livre III de ce code mais de la législation sur les droits d'auteur.