Conseil 20191579 Séance du 06/06/2019
Caractère communicable, à un expert judiciaire et/ou aux tiers présents à l'expertise, dont l'entreprise attributaire en 2011 du marché de travaux pour lequel l'exécution a débuté, des documents suivants, sachant qu'une décision partielle d'exécution aux frais et risques a ensuite été prononcée aux torts de cette entreprise, ayant conduit au lancement d'un nouvel appel d'offres en 2012 afin de choisir une autre entreprise chargée d'exécuter la fin des travaux :
1) les offres non retenues relatives au lancement du second appel d'offres ;
2) le rapport d'analyse des offres.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 6 juin 2019 votre demande de conseil relative au caractère communicable, à un expert judiciaire et/ou aux tiers présents à l'expertise, dont l'entreprise attributaire en 2011 du marché de travaux pour lequel l'exécution a débuté, des documents suivants, sachant qu'une décision partielle d'exécution aux frais et risques a ensuite été prononcée aux torts de cette entreprise, ayant conduit au lancement d'un nouvel appel d'offres en 2012 afin de choisir une autre entreprise chargée d'exécuter la fin des travaux :
1) les offres non retenues relatives au lancement du second appel d'offres ;
2) le rapport d'analyse des offres.
La commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code.
Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi du bordereau des prix unitaires.
L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
La commission relève que les dispositions du code des relations entre le public et l'administration ne sauraient toutefois faire obstacle aux prérogatives d'investigation dont dispose un expert mandaté par un juge dans le cadre d'une procédure contentieuse. Ainsi, la communication de documents à un expert dans le cadre d'une procédure engagée devant une juridiction s'effectue sur le fondement de dispositions particulières, résultant du code de procédure civile, du code de procédure pénale ou du code de justice administrative, avec lesquelles le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne saurait interférer. La commission n'a toutefois pas reçu compétence pour interpréter ces textes particuliers et elle ne peut donc se prononcer sur la communicabilité de ce document sur ce fondement
En revanche, la commission estime que les documents visés au point 1) sont communicables après occultation des mentions couvertes par le secret des affaires en application des dispositions du code des relations entre le public et l'administration. S’agissant du rapport d’analyse des offres mentionné au point 2) de votre demande de conseil, il est également communicable sur ce même fondement s’agissant de l’entreprise lauréate, à l’exception des mentions couvertes par le secret des affaires. Les mentions qui se rapportent aux autres candidats ne sont quant à elles communicables qu’à ces derniers.