Avis 20190009 Séance du 18/04/2019
Communication des factures de travaux concernant la modification du branchement de l'eau, réalisés sur les propriétés agricoles des villages de Rebourseaux-Bouilly dans le cadre de la mise en place de l'assainissement collectif (délibération du 10 février 2017).
Monsieur X, pour le compte de l'association « X », a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 2 janvier 2019, du refus opposé par le Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable de la région de Saint-Florentin (SIAEP 89) à sa demande de communication des factures de travaux concernant la modification du branchement de l'eau, réalisés sur les propriétés agricoles des villages de Rebourseaux-Bouilly dans le cadre de la mise en place de l'assainissement collectif.
A titre liminaire, la commission regarde la demande, compte tenu des documents joints, en particulier le compte-rendu de la réunion du conseil municipal de Rebourseaux du 10 février 2017 comme portant, d'une part, sur la facture de l'installation d'un dispositif de comptage individuel permettant de séparer les eaux résiduaires de l'activité agricole des eaux résiduaires domestiques, que la municipalité a décidé de prendre en charge à ses frais en ce qui concerne les exploitations agricoles existant à cette date, et, d'autre part, sur le montant des sommes dues au titre de la redevance d'assainissement collectif par les usagers des communes de Bouilly et Rebourseaux.
En ce qui concerne la facture de l'installation d'un dispositif de comptage individuel:
En l'absence de réponse du SIAEP 89 à la date de sa séance, la commission rappelle qu'’il résulte des articles L2121-26, L5211-46 et L5721-6 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux du conseil municipal, du conseil d'un établissement de coopération intercommunale, de l'organe délibérant des syndicats mixtes, des budgets et des comptes des communes, de ces établissements publics et syndicats mixtes, ainsi que des arrêtés municipaux et arrêtés des présidents des établissements publics de coopération intercommunale et syndicats mixtes, ainsi que de leurs budgets et de leurs comptes. Ces documents ainsi que les pièces qui y sont annexées sont communicables à toute personne qui en fait la demande, selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration (CE, Section, 11 janvier 1978, Commune de Muret, p. 5), sous réserve de mentions susceptibles de porter atteinte à la protection de la vie privée (conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012).
Par ailleurs, les documents se rattachant directement à la mission de service public de distribution de l'eau potable revêtent un caractère administratif et contiennent des informations relatives à l’environnement au sens des dispositions du 1° de l’article L124-2 du code de l’environnement.
La commission estime, par conséquent, que la facture de l'installation d'un dispositif de comptage individuel permettant de séparer les eaux résiduaires de l'activité agricole des eaux résiduaires domestiques est communicable à toute personne qui le demande, sur le fondement des dispositions précitées, étant relevé qu'aucune donnée relative à la vie privée n'étant en principe contenue dans une telle facture. L'adresse du bien concerné ainsi que le nom de son propriétaire ne relève pas de la vie privée dès lors que le bien en cause fait l'objet d'une exploitation agricole.
En ce qui concerne les redevances d'assainissement collectif:
La commission relève que l'article L1331-7 du code de la santé publique prévoit que les propriétaires des immeubles soumis à l'obligation de raccordement au réseau public de collecte des eaux usées en application de l'article L1331-1 de ce code peuvent être astreints par la commune, la métropole de Lyon, l'établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte compétent en matière d'assainissement collectif, à verser une participation pour le financement de l'assainissement collectif, pour tenir compte de l'économie par eux réalisée en évitant une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle réglementaire ou la mise aux normes d'une telle installation, qui s'élève au maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose de l'installation. Cette participation a succédé à l'ancienne participation pour raccordement à l'égout (PRE), dont le montant était librement fixé par la commune dans la limite d’une somme correspondant à 80 % du coût de fourniture et de pose d’une installation d’évacuation ou d’épuration individuelle.
En premier lieu, aux termes de l’article L124-2 du code de l'environnement, est considérée comme information relative à l'environnement « toute information disponible, quel qu'en soit le support, qui a pour objet : / 1° L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; / 2° Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1° (...) ».
La commission considère, en conséquence, que la liste des personnes redevables de la participation définie par l'article L1331-7 du code de la santé publique ou de l'ancienne participation pour raccordement à l'égout comporte des informations relatives à l'environnement au sens des dispositions de l’article L124-2 du code de l’environnement.
En deuxième lieu, en application de l’article L124-1 du même code, le droit d’accès à ce document s’exerce dans les conditions définies par les dispositions du titre Ier de la loi du 17 juillet 1978, aujourd'hui codifiées au livre III du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l'environnement. En application de l’article L124-1 du même code, le droit d’accès à de tels documents s’exerce dans les conditions définies au livre III du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l'environnement. En application de ces dispositions et du 1° du I de l'article L124-4 du code de l'environnement, l'autorité publique peut rejeter la demande d'une information relative à l'environnement dont la consultation ou la communication porte atteinte, notamment au secret de la vie privée ainsi que celles susceptibles de révéler le comportement d'une personne d'une manière susceptible de lui cause préjudice.
La commission rappelle que ces dispositions doivent être lues à la lumière de celles de la directive 2003/4/CE concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, dont elles assurent la transposition. La directive prévoit au f) du paragraphe 2 de son article 4 que les États membres peuvent prévoir qu'une demande d'informations environnementales peut être rejetée lorsque la divulgation des informations porterait atteinte à la confidentialité des données à caractère personnel et/ou des dossiers concernant une personne physique si cette personne n'a pas consenti à la divulgation de ces informations au public, lorsque la confidentialité de ce type d'information est prévue par le droit national ou le droit de l'Union européenne. Le dixième alinéa de ce même paragraphe 2, prévoit toutefois que les motifs de refus visés au paragraphe 2 sont interprétés de manière restrictive, en tenant compte dans le cas d'espèce de l'intérêt que présenterait pour le public la divulgation de l'information. Dans chaque cas particulier, l'intérêt public servi par la divulgation est mis en balance avec l'intérêt servi par le refus de divulguer.
En troisième lieu, la commission constate que le Conseil d’État avait jugé, s'agissant de l'ancienne participation pour raccordement à l'égoût (PRE), dont le montant était librement fixé par la commune dans la limite d’une somme correspondant à 80 % du coût de fourniture et de pose d’une installation d’évacuation ou d’épuration individuelle, que les sommes réclamées à ce titre devaient être regardées comme des remboursements de frais avancés par la commune, et non des « impositions de toutes natures » au sens de l'article 34 de la Constitution (CE 27 juin 1973, Ville de Marseille, n° 85510, Rec. p. 444; 24 juin 1985, Commune de Marseillan, nos 33855, 33889 et 33890, aux T. p. 575). Elle observe que le calcul du montant de la participation mentionnée à l'article L1331-7 du code de la santé publique, qui a succédé à la PRE, a également pour objet de rembourser des frais avancés par les communes, sans qu'ait d'incidence, à cet égard, la circonstance que le fait générateur de cette participation soit constitué par le raccordement au réseau d'assainissement collectif et non plus, par une autorisation d'urbanisme ou les prescriptions y afférentes. La commission en déduit que ni la PRE ni la participation définie par l'article L1331-7 du code de la santé publique, instituée par la première loi de finances rectificative pour 2012 n'entrent dans le champ d'application des dispositions de l’article L103 du livre des procédures fiscales. Elle estime, par conséquent, que ces dispositions ne peuvent être utilement opposées à une demande de communication d'une liste de redevables de ces participations ainsi que du montant mis à leur charge.
Dès lors, la commission considère que toute personne peut demander communication de la liste des redevables de la participation pour le financement à l'assainissement collectif, comprenant le nom du redevable et l’adresse du bien, sous réserve de l'occultation préalable, au titre du 2° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, des coordonnées privées des personnes physiques concernées ainsi que de toute mention susceptible de révéler leur situation patrimoniale ou familiale.
En ce qui concerne le montant versé au titre de la redevance, qui comporte une part fixe et une part proportionnelle à l'usage des installations d'assainissement collectif, la commission considère qu'il y a lieu de distinguer les immeubles à usage d'habitation de ceux faisant l'objet d'une exploitation agricole, que celle-ci soit le fait d'une personne physique ou d'une personne morale.
La commission estime que, compte tenu des incidences possibles ou avérées résultant d'une exploitation agricole, les informations environnementales contenues dans le montant total versé et du détail relatif à la part proportionnelle due par une exploitation agricole sont en principe communicables au public, quand bien même elles feraient apparaître le comportement de personnes physiques dans des conditions susceptibles de leur porter préjudice, et sans qu'y fasse obstacle, le cas échéant, la circonstance que l'installation soit exploitée par une personne physique, et non par une personne morale. Toutefois, dès lors que le I de l'article L124-4 du code de l'environnement impose à l'autorité administrative d'apprécier, au cas par cas, si l'intérêt de la communication des informations environnementales prévaut sur les intérêts à protéger, il lui appartient de tenir compte des circonstances particulières dans lesquelles s'inscrit chaque demande de communication qui lui est adressée. Un refus de communication pourrait ainsi être justifié, s'il s'avérait, par exemple, que, compte tenu du contexte local, la communication serait susceptible de porter atteinte à la sécurité publique ou à la sécurité d'un exploitant.
La commission estime que la divulgation du montant dû par les habitations, qu'il s'agisse du montant total, susceptible de révéler la part proportionnelle, ou cette part proportionnelle n’est, en revanche, pas nécessaire à la satisfaction des intérêts publics protégés par les dispositions européennes et nationales pertinentes en matière environnementale. Le montant de la part fixe a, pour sa part, fait l'objet d'une diffusion publique.
Dès lors, la commission émet un avis favorable à la demande en ce qui concerne la facture de l'installation d'un dispositif de comptage individuel, la liste des redevables de la redevance d'assainissement, ainsi que le montant des redevances d'assainissement dues par les immeubles faisant l'objet d'une exploitation agricole, sauf circonstances particulières étayées, établies par la commune en raison de risques particuliers pour la sécurité publique ou la sécurité d'un exploitant. Elle émet un avis défavorable sur le surplus de la demande.