Avis 20185065 Séance du 06/12/2018
Communication de l’intégralité du dossier d’options de sûreté (DOS) du projet de piscine centralisée d’entreposage de combustibles nucléaires usés.
Madame X, pour le réseau X , a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 5 juin 2018, à la suite du refus opposé par le directeur général d'EDF à sa demande de communication de l’intégralité du dossier d’options de sûreté (DOS) du projet de piscine centralisée d’entreposage de combustibles nucléaires usés.
La commission rappelle, à titre liminaire, que, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004, Électricité de France est devenue une société de droit privé chargée d'une mission de service public. La commission rappelle à cet égard que si le droit d'accès aux documents administratifs s'exerce auprès des personnes privées chargées de la gestion d'un service public, seuls sont soumis aux prescriptions du livre III du code des relations entre le public et l’administration, les documents de nature administrative détenus par ces personnes. En l'espèce la commission considère que le dossier sollicité se rattache directement à une des missions de service public d'EDF définies aux articles L121-1 et L121-2 du code de l'énergie.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur général d'EDF a informé la commission que le dossier sollicité avait été communiqué à Madame X par courrier en date du 11 juillet 2018 et remis en mains propres le 20 septembre 2018.
La commission en prend note et constate, en premier lieu, que la demande porte sur la communication du DOS dans son intégralité dans la mesure où la version communiquée par EDF comporte des occultations au titre de la protection contre les actes malveillants.
La commission relève, en deuxième lieu, que cette demande s’inscrit dans le cadre de l’article 19 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, désormais codifié à l'article L125-10 du code de l'environnement, qu’elle est compétente pour interpréter conformément au B de l’article L342-2 du code des relations entre le public et l’administration. Il résulte de cet article que toute personne a le droit d'obtenir, auprès de l'exploitant d'une installation nucléaire de base, les informations détenues sur les risques liés à l'exposition aux rayonnements ionisants pouvant résulter de cette activité et sur les mesures de sûreté et de radioprotection prises pour prévenir ou réduire ces risques ou expositions, dans les conditions définies aux articles L124-1 à L124-6 du code de l'environnement.
La commission estime que, eu égard à l’objet de ces dispositions qui visent à assurer un degré élevé de transparence et à permettre au public d’apprécier si et dans quelle mesure il est ou pourrait être exposé à des rayonnements ionisants, ces informations doivent être interprétées comme incluant non seulement les informations sur la nature, la quantité, la composition et le caractère nocif des émissions, mais également sur les risques d’émissions ainsi que sur les mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets.
La commission a ainsi estimé, dans un conseil n° 20093465 du 5 novembre 2009, réaffirmé dans son avis n° 20173363 du 11 janvier 2018 que les rayonnements ionisants, de même que les déchets et rejets d’effluents issus des installations nucléaires, constituent des émissions au sens de l'article L124-5 du code de l'environnement qui prévoient que la communication des informations relatives à des émissions dans l’environnement ne peut être refusée que si elle porte atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, au déroulement des procédures juridictionnelles ou à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales, ou à des droits de propriété intellectuelle. Ainsi, le secret des affaires ne saurait-il faire obstacle à la communication de telles informations.
En application de ces principes, la commission considère que le dossier sollicité, qui est relatif aux risques d’émissions et aux mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets, est communicable, sous réserve de l'occultation préalable des mentions ayant trait à la sécurité publique.
La commission rappelle à cet égard qu’il ne lui appartient pas d’indiquer précisément et de manière exhaustive, au sein d’un document volumineux, les mentions qui doivent être occultées en application des règles rappelées ci-dessus, cette opération incombant à l'administration, mais seulement d’éclairer cette dernière sur le caractère communicable ou non de passages ou informations soulevant des difficultés particulières d’appréciation et sur lesquels l'administration attire son attention.
En l’espèce, la commission a pu prendre connaissance du DOS dans le cadre d'une demande identique formulée auprès de l'Autorité de sûreté nucléaire (cf avis n° 20181163) dans sa version intégrale et dans la version occultée telle que communiquée à Madame X. Cette dernière a en outre informé la commission que la version du DOS qui lui a été transmise par l'ASN est identique à celle qui lui a été transmise par EDF, cette société ayant elle-même effectué les occultations.
La commission note par ailleurs que le DOS a fait l'objet de compléments en octobre et novembre 2017 qui n'ont pas été communiqués à Madame X.
La commission considère que les occultations auxquelles il a été procédé ont été effectuées à bon escient, à l'exception toutefois des informations relatives à la conception et au fonctionnement de l'ouvrage telles que celles occultées, par exemple pp. 37 et 42, 43 et 44, qui ne lui semblent pas relever d'un motif de sécurité publique mais davantage du secret des procédés.
Il résulte de ce qui précède que la commission émet un avis défavorable à la communication du DOS et des compléments d'octobre et novembre 2017 dans leur intégralité et considère que la communication du document occulté par EDF n'a pas eu pour effet de rendre la demande sans objet. Elle émet par suite un avis favorable à la demande, sous les réserves qui viennent d'être rappelées.