Conseil 20184637 Séance du 22/11/2018
Caractère communicable à une association, des résultats d'analyses effectuées par le service en charge du Schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) concernant le stockage de déchets polluants sur une exploitation agricole créant une décharge sauvage, dans le cadre d'opérations préliminaires à des procédures à engager devant les juridictions.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 22 novembre 2018 votre demande de conseil relative au caractère communicable à une association, des résultats d'analyses effectuées par le service en charge du schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) concernant le stockage de déchets polluants sur une exploitation agricole créant une décharge sauvage, dans le cadre d'opérations préliminaires à des procédures à engager devant les juridictions.
La commission vous rappelle, à titre liminaire, que l'article L124-2 du code de l'environnement, qui a transposé l'article 2 de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « 1º L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; 2º Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1º ; 3º L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus (….) ».
La commission souligne, par ailleurs, qu'en vertu des dispositions du II de l'article L124-5 du code de l’environnement, l'autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur une information relative à des émissions dans l'environnement que dans le cas où sa consultation ou sa communication porterait atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, ou encore au déroulement des procédures juridictionnelles, à la recherche d'infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales ou enfin à des droits de propriété intellectuelle. Il en résulte que les informations relatives à des émissions dans l'environnement, sont en principe communicables, quand bien même elles seraient couvertes par le secret commercial et industriel.
Par deux arrêts c-673/13 et c-442/14 du 23 novembre 2016, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a précisé la notion d’« émissions dans l’environnement ». Elle a ainsi jugé que cette notion couvre toutes les informations sur ces émissions qui sont pertinentes pour la protection de l'environnement, notamment le rejet dans l’environnement de produits ou de substances provenant d’installations industrielles (telles que les usines et les centrales), mais également les émissions résultant de la pulvérisation d’un produit, tel qu’un produit phytopharmaceutique ou biocide, dans l’air ou de son application sur les plantes, dans l’eau ou sur le sol, pour autant que ce rejet soit effectif ou prévisible dans des conditions normales ou réalistes d’utilisation du produit ou de la substance. Sont en revanche exclues de la notion d’informations relatives à des émissions dans l’environnement celles qui se rapportent à des émissions purement hypothétiques.
En l'espèce, la commission relève que vous indiquez que les rapports d'analyse dont la communication vous est demandée par une association de défense de l'environnement ont été diligentés à la suite d'information faisant état de la présence de dépôts sauvages de déchets polluants issus d'activités industrielles et artisanales. La commission, qui n'est pas en mesure de déterminer si les résultats de ces analyses effectués en amont et en aval du site concerné révèlent ou non l'existence d'émissions effectives de substances dans les eaux analysées, considère néanmoins que compte tenu des informations portées à votre connaissance, l'existence d'émissions de substances est raisonnablement prévisible. La commission en conclut que ces rapports d'analyse comportent des informations relatives à des émissions de substance dans l'environnement. Leur communication ne peut par suite être refusée que pour l'un des motifs énumérés à l'article L124-5 du code de l'environnement, notamment si cette communication porte atteinte au déroulement de procédures juridictionnelles.
Vous indiquez à cet égard qu'il est envisagé d'engager une procédure devant les juridictions compétentes. La commission vous précise toutefois que cette seule circonstance ne conduit pas nécessairement à considérer que la communication de ces rapports pourrait légalement être refusée.
La commission vous précise en effet qu'elle estime que les dispositions précitées du II de l’article L124-5 du code de l'environnement ne font obstacle à la communication d'informations relatives à des émissions de substances dans l'environnement, au cours d’une procédure juridictionnelle, que dans l'hypothèse où cette communication serait de nature à porter atteinte au déroulement de l'instruction, à retarder le jugement de l'affaire, à compliquer l'office du juge ou à empiéter sur ses compétences et prérogatives. La seule circonstance que ces informations portent sur des faits faisant l'objet d'une procédure juridictionnelle, qu'elles aient été transmises au juge ou que leur communication serait de nature à affecter les intérêts d'une partie à la procédure, qu'il s'agisse d'une personne publique ou de tout autre personne, ne saurait légalement justifier un refus de communication sur ce fondement. Il n'apparaît pas à la commission, en l'état des informations dont elle dispose, que tel serait le cas en l'espèce.