Avis 20184625 Séance du 07/02/2019
Communication des documents suivants relatifs au litige opposant le demandeur à la commune concernant la parcelle cadastrée S7 n° 0378/0010 :
1) les jugements n° U17/12-RG 15/00531, n° U17/13-RG 15/00532 et U17/14-RG 15/00533 ;
2) les actes du contrôle règlementaire effectué dans le cadre du transfert de propriété et des contrôles effectués à cet effet (entretien, assurance, relevés topographiques, etc.) ;
3) les mandats et les pièces à l'appui de ces actes, relatifs au paiement du cabinet d'avocat, des frais de procédures et du paiement des pénalités versées à chacun ;
4) les comptes de campagne électorale et toutes les pièces correspondantes adressés à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) dans l'exercice des missions du maire.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par un courrier enregistré à son secrétariat le 24 septembre 2018, du refus opposé par le maire de Kaysersberg Vignoble à sa demande de communication des documents suivants relatifs à la parcelle cadastrée S7 n° 0378/0010 :
1) les jugements n° U17/12-RG 15/00531, n° U17/13-RG 15/00532 et U17/14-RG 15/00533 du tribunal de grande instance de Colmar ;
2) les actes du contrôle règlementaire effectué dans le cadre du transfert de propriété et des contrôles effectués à cet effet (entretien, assurance, relevés topographiques, etc.) ;
3) les mandats et les pièces relatives au paiement du cabinet d'avocat, aux frais de procédures et au paiement des pénalités ;
4) les comptes de campagne électorale et toutes les pièces correspondantes adressés à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) concernant Monsieur X.
Ayant pris connaissance de la réponse de la commune de Kaysersberg Vignoble à la demande qui lui a été adressée, la commission rappelle, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11-3 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972, « les tiers sont en droit de se faire délivrer copie des jugements prononcés publiquement ». Si la commission est compétente, en application de l'article L342-1 du code des relations entre le public et l'administration, pour émettre un avis sur toute décision défavorable en matière de réutilisation des informations publiques contenues dans ces documents (cf conseil CADA n°20103040 du 27 juillet 2010), elle ne l'est pas pour se prononcer sur une simple demande d'accès à ces documents, qui ne revêtent pas le caractère de documents administratifs au sens de l'article L300-2 du même code. Dès lors, la commission est incompétente pour se prononcer sur le point 1) de la demande. La commission prend note, à cet égard, du courrier de la commune du 16 juillet 2018 invitant monsieur X à solliciter les documents en cause auprès du greffe du tribunal de grande instance de Colmar.
En deuxième lieu, la commission constate qu'au regard des éléments qui lui ont été communiqués, elle n'est pas en mesure de déterminer si le demandeur conteste la cession d'une parcelle par la commune à trois personnes physiques de droit privé ou le statut de cette parcelle. La commission souligne en tout état de cause que seul le juge judiciaire, après avoir, le cas échéant, renvoyé une question préjudicielle au juge administratif, est compétent pour déterminer si la parcelle en cause appartient à des personnes physiques ou morales de droit privé, au domaine public, ou au domaine privé de la commune.
Dans l'hypothèse où la parcelle en cause aurait été la propriété de personnes morales ou physiques de droit privé à la date du contrôle effectué par des agents publics, les actes établis à l'occasion de ce contrôle ne revêtiraient un caractère administratif que s'ils étaient établis par une administration au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration et ne seraient communicables qu'à une personne intéressée au sens de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. Il n'en irait autrement que si les résultats de ces contrôles étaient annexés à une demande d'autorisation individuelle d'urbanisme. Il résulte de la décision du Conseil d'État du 17 avril 2013, ministre de l'immigration nationale et du développement solidaire c/ M. X (n° 337194, mentionnée aux tables du recueil X), que l'intéressé, au sens de l'article L300-6 du code des relations entre le public et l'administration, est la personne directement concernée par le document, c'est-à-dire, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication. Eu égard aux informations à sa disposition, la commission considère que Monsieur X ne revêt pas la qualité d'intéressé au sens de ces dispositions.
Dans l'hypothèse où la parcelle aurait relevé du domaine public à la date des contrôles, la commission estime que les documents mentionnés au point 2) de la demande seraient communicables, sur le fondement de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, à toute personne qui les demande, sous réserve qu'ils aient perdu leur caractère préparatoire.
Dès lors qu'aux termes de l'article L300-3 du code des relations entre le public et l'administration: « Les titres Ier, II et IV du présent livre s'appliquent également aux documents relatifs à la gestion du domaine privé de l'État et des collectivités territoriales », il en irait de même si la parcelle relevait du domaine privé de la commune.
En troisième lieu, la commission rappelle, s'agissant des documents mentionnés au point 3), que les honoraires versés à un avocat par une personne de droit privé dans un litige auquel est partie ou intervenante une administration ainsi que les mandats accordés à un conseil ne revêtent pas le caractère de documents administratifs. En outre, le premier alinéa de l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose : « En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle », les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel ». En application de ces dispositions, le Conseil d'État (CE, Ass. , 27 mai 2005, Département de l'Essonne) a jugé que l'ensemble des correspondances échangées entre un avocat et son client, en l’espèce un département, notamment les consultations juridiques rédigées par l'avocat à son intention, sont des documents administratifs couverts par le secret professionnel. Il résulte également de la jurisprudence de la Cour de cassation que le secret professionnel de l’avocat couvre l’ensemble des pièces du dossier ainsi que l’ensemble des correspondances échangées entre l’avocat et son client, y compris celles de ces correspondances qui n’ont pas de rapport direct avec la stratégie de défense – comme la convention d'honoraires, ou les facturations afférentes émises par l’avocat (Cour de cassation, Civ-1, 13 mars 2008, pourvoi n° B05 – 11314). La commission en déduit que les honoraires versés à un avocat par la commune ainsi que le mandat qui lui a été donné ne sont pas communicables. En revanche, les documents relatifs au paiement éventuel d'une somme en exécution d'un jugement, sont détachables de la fonction de juger. Ils sont, par suite, communicables à toute personne qui les demande sur le fondement de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. La commission prend note de l'intention de la commune de communiquer ces documents dès lors qu'ils ont perdu leur caractère préparatoire.
En dernier lieu, la commission rappelle que le sixième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration prévoit que lorsqu'une administration mentionnée à l'article L300-2 de ce code est saisie d'une demande de communication portant sur un document administratif qu'elle ne détient pas mais qui est détenu par une autre administration mentionnée au même article, elle la transmet à cette dernière et en avise l'intéressé. En vertu de ces dispositions, une commune dans laquelle sont organisées des élections municipales relevant de la compétence de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) est tenu de transmettre à cette dernière une demande portant sur l'accès aux documents qui justifient les écritures figurant dans le compte de campagne d'un candidat. Ainsi, toutefois, que le relève la commune de Kaysersberg Vignoble, les élections municipales ayant conduit à l'élection de Monsieur X n'entraient pas dans le champ de la compétence de la Commission, dès lors qu'il résulte des dispositions combinées du dernier alinéa de l'article L52-4 et de l'article L52-25 du code électoral que la Commission n'est pas compétente pour contrôler les dépenses engagées pour l'élection des conseillers municipaux dans les communes de moins de 9 000 habitants. La demande est dès lors sans objet sur ce point.