Avis 20182280 Séance du 13/09/2018

Communication, par courrier électronique et non consultation sur place comme proposé par l'administration, des tables décennales des naissances, mariages et décès pour la période courant de 1940 à 2015.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 15 mai 2018, à la suite du refus opposé par le maire de Dreux à sa demande de communication, par courrier électronique et non consultation sur place comme proposé par l'administration, des tables décennales des naissances, mariages et décès pour la période courant de 1940 à 2015. La commission rappelle que les documents sollicités ont été dressés en application du décret n° 51-284 du 3 mars 1951 relatif aux tables annuelles et décennales de l'état civil, remplacé par le décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil. Le décret du 3 mars 1951 prévoit qu'il est établi, tous les ans, dans chaque commune, une table alphabétique des actes de l'état civil pour les naissances, pour les mariages et les divorces, ainsi que pour les décès. A l’aide de ces tables annuelles, l’officier de l’état civil dresse ensuite, dans les six premiers mois de la onzième année, des tables alphabétiques décennales qui recensent les mêmes actes par ordre alphabétique sur toute la période. Ces tables se présentent sous la forme de registres indépendants des registres d’état civil et ne mentionnent en principe que les noms des personnes concernées et la date de l’acte. La commission rappelle que la nature et le contenu des tables décennales en font des documents administratifs dont la communication est régie par les dispositions du titre I du livre III du code des relations entre le public et l'administration (conseil n° 20103032 et CE 9 février 1983, X, n° 35292). Elle précise également qu'elle a estimé, à la lumière de l'exposé des motifs du projet de loi qui devait devenir la loi n° 2008-696 du 15 juillet 2008 relative aux archives, que le législateur avait entendu instaurer la libre communicabilité, dès leur établissement, non seulement des registres de décès, mais également des tables décennales de naissance, de mariage et de décès, et en a déduit que les tables décennales étaient librement communicables à toute personne qui en fait la demande dès leur établissement. La commission constate que si, avant l'intervention du décret du 6 mai 2017, les tables ne devaient mentionner que la date de l’acte de naissance, et le nom de la personne, la pratique montre que la tenue de ces documents n'était pas homogène et que les services ne se limitaient pas nécessairement aux informations prévues par la réglementation. Il n'est ainsi pas rare que les services de l'état civil apposent sur les tables de naissance des mentions relatives à la filiation par une abréviation ou, comme en l'espèce, les noms et prénoms des parents. La commission souligne que les mentions relatives à la filiation d'une personne relèvent de sa vie privée et qu'il ne peut être déduit des dispositions de la loi du 15 juillet 2008 que le législateur a entendu que des informations autres que celles qu'il a expressément mentionnées, à savoir le nom et la date de l'acte, soient communicables sans délai aux tiers. La commission précise en conséquence que les tables annuelles et décennales sont, dès leur élaboration, librement communicables à toute personne qui les demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, à condition qu'elles ne comprennent pas d'autres informations personnelles que le nom des personnes concernées et la date ou le numéro de l'acte. Les autres mentions, s'il en existe, comme en l'espèce, qui relèvent de la vie privée des personnes intéressées, ne sont communicables qu'à ces dernières chacune en ce qui la concerne en application des dispositions de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration et ne deviendront librement communicables, en application du 3° de l'article L213-2 du code du patrimoine, qu'à l'issue d'un délai de 50 ans à compter du dernier acte qui y est transcrit, c'est-à dire, en l'espèce, 2032. Il appartient, dès lors, en application de l'article L311-7 du même code, à l'administration d'occulter ces mentions avant de communiquer les tables aux tiers. S'agissant des modalités de communication, le maire de Dreux a informé la commission qu'il disposait d'une version numérique des tables décennales des naissances et d'une partie des tables décennales des mariages et des décès, en l'espèce à partir de 1979 pour les premières et de 1984 pour les secondes, dont il a proposé d'en adresser une copie au demandeur, et que, s'agissant des tables décennales non disponibles sous cette forme, il ne pouvait en effectuer la reproduction compte tenu du volume de documents concernés. En ce qui concerne les modalités de communication des tables décennales non numérisées, la commission rappelle qu'en vertu de l'article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration, l'accès aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration, soit par consultation gratuite sur place, soit par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique, soit, sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par la délivrance d'une copie sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou compatible avec celui-ci et aux frais du demandeur, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction et de l’envoi du document, soit par publication des informations en ligne, à moins que les documents ne soient communicables qu'à l'intéressé en application de l'article L311-6 du même code. Elle estime toutefois que ces dispositions ne font pas obligation à l’administration de communiquer sous forme électronique les documents dont elle ne dispose pas déjà sous cette forme, ou de numériser un document uniquement disponible en version papier. La commission considère par ailleurs que les documents sollicités représentent une masse importante que l'administration n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles et qu'elle est en droit d'inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Alternativement, elle peut convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication compatible avec le bon fonctionnement des services. Par ailleurs, si l’administration ne dispose pas des moyens de reproduction nécessaires pour satisfaire une demande de communication portant sur un volume important de documents, elle peut faire établir un devis auprès d’un prestataire de service extérieur. Il lui appartiendra alors d'adresser le devis de ce dernier au demandeur pour qu'il y donne suite, s'il y a lieu. La commission émet donc un avis favorable à la communication au demandeur des tables décennales disponibles sous format numérique, sous les réserves mentionnées plus haut, et prend note de l'intention du maire de Dreux de procéder à leur communication. Elle émet en revanche un avis défavorable à la communication par courrier électronique des tables décennales non disponibles sous format numérique.