Avis 20174279 Séance du 16/11/2017

Communication, en sa qualité de député du Val-de-Marne, des documents suivants : 1) les comptes détaillés de la société TELT couvrant les exercices 2001 à 2016, faisant apparaître notamment le détail du compte de résultat et celui des autres achats et charges externes ; 2) les rapports spéciaux des commissaires aux comptes et les conventions réglementées, approuvées par la société TELT, pour les exercices 2001 à 2016 ; 3) la liste des actifs de la société TELT donnés en garantie ou concernés par des mesures en application des résolutions n° 4, 5 et 6 de l'assemblée générale ordinaire du 26 juin 2015 ; 4) le détail et le montant des emprunts ou des financements souscrits par la société pour les exercices 2001 à 2016, notamment par financements bancaires sous forme d'emprunt ou de mobilisation de créance, de dettes fournisseurs, etc..
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 août 2017, à la suite du refus opposé par le président du Tunnel Euralpin Lyon Turin à sa demande de communication, en sa qualité de député du Val-de-Marne, des documents suivants : 1) les comptes détaillés de la société TELT couvrant les exercices 2001 à 2016, faisant apparaître notamment le détail du compte de résultat et celui des autres achats et charges externes ; 2) les rapports spéciaux des commissaires aux comptes et les conventions réglementées, approuvées par la société TELT, pour les exercices 2001 à 2016 ; 3) la liste des actifs de la société TELT donnés en garantie ou concernés par des mesures en application des résolutions n° 4, 5 et 6 de l'assemblée générale ordinaire du 26 juin 2015 ; 4) le détail et le montant des emprunts ou des financements souscrits par la société pour les exercices 2001 à 2016, notamment par financements bancaires sous forme d'emprunt ou de mobilisation de créance, de dettes fournisseurs, etc. La commission rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les députés tirent, en cette qualité, de textes particuliers. Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce qu’ils puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions qu'ils exercent ou des mandats qu'ils détiennent. En l'absence de réponse de l'administration à la date de la séance, la commission rappelle ensuite qu’en application de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, sont considérés comme des documents administratifs « les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales, ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission ». La commission indique que le Conseil d’État, dans sa décision CE, Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés, n° 264541, a jugé qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public. Toutefois, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission. La commission relève qu’en l’espèce, Tunnel Euralpin Lyon-Turin (TELT) a été créée par les gouvernements français et italien, par un accord signé le 30 janvier 2012 et entré en vigueur le 1er août 2014, dans la perspective de la réalisation d'une nouvelle ligne ferroviaire entre Lyon et Turin. La commission relève que TELT a été créée, à cette date, comme une société par actions simplifiée pour une durée de 99 ans. La SAS TELT est, aux termes de ses statuts, le promoteur public chargé de la réalisation puis de la gestion de la section transfrontalière de la future liaison ferroviaire Lyon-Turin. Si cette société a été créée sous la forme d'une société par actions simplifiée, l’État français et la régie italienne des transports ferroviaires en sont, à parité, les deux associés. Il en découle que l’État français approuve les orientations stratégiques arrêtées par TELT, accompagne et contrôle la mise en œuvre opérationnelle des objectifs qui lui sont fixés. En outre, TELT est amenée, pour l'exercice de ces missions, à recourir à des contrats de travaux, de services et de fournitures dans les conditions qui sont indiquées à l'article 6.5 de l'accord franco-italien du 30 janvier 2012 et en conformité avec les exigences de publicité et de mise en concurrence qui découlent notamment de la directive 2004/17/CE. La commission estime que ces éléments, nonobstant le fait que la SAS TELT soit dépourvue de prérogatives de puissance publique, révèlent que l’Etat a entendu lui confier une mission de service public. Elle en déduit que les documents demandés, dès lors qu'ils sont élaborés par la société elle-même ou établis à la demande de celle-ci par un prestataire extérieur, comme c'est par exemple le cas des rapports établis par les commissaires aux comptes, dans le cadre de sa mission de service public, sont des documents administratifs communicables à toute personne qui en fait la demande, sous réserve de l’occultation des éventuelles mentions couvertes par le secret en matière industrielle et commerciale, en application des articles L311-1 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. La commission relève toutefois qu’en application de l’article L311-2 du même code, le droit à communication ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique, y compris par un accès payant à un prix raisonnable. Elle émet donc un avis favorable, sous les réserves ainsi émises, aux seuls documents sollicités qui n’auraient pas fait l’objet d’une mesure de publicité prévue par le code de commerce et d’une publication au registre des sociétés tenu par les greffes des tribunaux de commerce.