Conseil 20165377 Séance du 15/12/2016

Caractère communicable des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM), liant l'Etat aux établissements de santé.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 15 décembre 2016 votre demande de conseil relative au caractère communicable des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) liant l'Etat aux établissements de santé. La commission rappelle, ainsi qu’elle l’avait fait dans de précédents avis (n° 20083020 du 25 septembre 2008 et n° 20142274 du 3 juillet 2014) que les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens conclus par les agences régionales de santé (ARS) avec les établissements de santé en application de l'article L6114-1 du code de la santé publique constituent des documents administratifs dont la communication est régie par les articles L311-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. La commission rappelle que le contenu des CPOM est fixé par les articles L6114-2 à L6114-4 du même code, qui n'a pas été substantiellement modifié par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. En vertu de l'article L6114-2 du code de la santé publique, les CPOM déterminent ainsi les orientations stratégiques des établissements, groupements de coopération sanitaire et titulaires d'autorisations sur la base des projets régionaux de santé (PRS) et des schémas régionaux d'organisation des soins (SROS). Ils précisent leurs engagements en matière d'innovation médicale et de recours, de retour à l'équilibre financier et en vue de la transformation de leurs activités et de leurs actions de coopération. Ils fixent les éléments relatifs aux missions de service public hospitalier que les établissements assurent en application de l'article L6112-2 de ce code, ainsi que, le cas échéant, les missions de soins ou de santé publique spécifiques qui leur sont assignés par l'ARS. Ils fixent également les objectifs quantifiés des activités de soins et d'équipements matériels lourds pour lesquels une autorisation a été délivrée et en définissent les conditions de mise en œuvre. Enfin ils identifient les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définissent, pour chacun d'entre eux, le nombre de référents à former et de lits. En application de l’article L6114-3 du même code, ces contrats comportent également des objectifs en matière : - de qualité et de sécurité des soins, ainsi que les engagements pris à la suite de la procédure de certification prévue à l'article L6113-3 ; - de maîtrise médicalisée des dépenses ; - d'évolution et d'amélioration des pratiques ; - de conditions de gestion, de prise en charge des patients et d'adaptation aux évolutions du système de santé à partir d'indicateurs de performance fixés par décret qui doivent être publiés chaque année ; - Les CPOM doivent aussi décrire les transformations relatives à l'organisation et à la gestion des établissements de santé et comporter un volet social et culturel. L’article L6114-4 de ce code prévoit enfin que ces contrats fixent le montant des tarifs des prestations mentionnées au 1° de l'article L162-22-1 du code de la sécurité sociale pour les établissements de santé privés à but lucratif. La commission relève ensuite que la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a procédé à une « refondation » de la notion de service public hospitalier, laquelle avait été supprimée par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires pour retenir une définition matérielle du service public autour de quatorze missions alors énumérées à l’article L6112-1 du code de la santé publique. Désormais l'article L6112-1 du code de la santé publique dispose que : «  le service public hospitalier exerce l'ensemble des missions dévolues aux établissements de santé » par les articles L6111-1 à L6111-6-1 du code de la santé publique « ainsi que l'aide médicale urgente ». Ces missions doivent être réalisées « dans le respect des principes d'égalité d'accès et de prise en charge, de continuité, d'adaptation et de neutralité ». L'article L6112-2 précise les garanties accordées aux patients des établissements de santé qui assurent une ou plusieurs missions de service public, en particulier l'adaptation et la permanence de l'accueil et de la prise en charge, l'absence de facturation des dépassements des tarifs fixés par l'autorité administrative, la participation des représentants des usagers du système de santé, la transmission par l'établissement à l'ARS de son compte d'exploitation). L’article L6112-3 du code de la santé publique précise la liste des acteurs susceptibles d'exercer une ou plusieurs missions de service public. Il s'agit des établissements publics de santé, des hôpitaux des armées, des établissements de santé privés habilités à assurer le service public hospitalier et qualifiés d'établissements de santé privés d'intérêt collectif en application de l'article L6161-5 et des autres établissements de santé privés habilités, après avis favorable conforme de la conférence médicale d'établissement, à assurer le service public hospitalier. L’article L6112-3 prévoit que les établissements de santé privés « sont habilités, sur leur demande, par le directeur général de l'agence régionale de santé s'ils s'engagent, dans le cadre de leurs négociations contractuelles mentionnées à l'article L6114-1, à exercer l'ensemble de leur activité dans les conditions énoncées à l'article L6112-2. » Après avoir pris connaissance de l'exemplaire de CPOM que vous lui avez communiqué, la commission considère que la communicabilité des CPOM dépend de la nature des informations qu’ils contiennent et du statut et des missions assurées par l'établissement de santé. La commission rappelle tout d'abord qu'aux termes du 1° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration ne sont pas communicables les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé prévu à l'article L6113-3 du code de la santé publique. Dès lors qu'il résulte de l’article L6113-4 de ce code que la procédure d'accréditation est engagée à l'initiative de l'établissement de santé, notamment dans le cadre du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens qui le lie à l'agence régionale de l'hospitalisation, la commission déduit de ces dispositions que, bien que les CPOM répondent à la définition de document administratif, les éléments du CPOM prévus à l’article L6114-3 du code de la santé publique, qui se rapportent à la procédure d’accréditation et, de manière générale, à la qualité et à la sécurité des soins et des pratiques médicales (en l'espèce l'annexe 2 du CPOM de la clinique Saint-Jean) sont exclus du droit à communication institué par les articles L311-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. La commission estime que les informations relatives aux tarifs et éléments financiers prévues à l’article L6114-4 du code de la santé publique, qui présentent un caractère réglementaire et se rapportent aux financements publics dont les établissements de santé sont susceptibles de bénéficier, sont communicables de plein droit à toute personne qui en fait la demande (en l'espèce, annexe 7 du CPOM de la clinique Saint-Jean). S'agissant des stipulations relatives au financement des missions d'intérêt général (MIG) et aux aides à la contractualisation (AC) versées en application de l'article L162-22-13 du code de la sécurité sociale, la commission relève que, dans sa décision du 20 décembre 2011, la Commission européenne a entendu encadrer les conditions dans lesquelles une compensation peut être versée par l'Etat aux opérateurs chargés de la gestion d'un service d'intérêt économique général, tels que les établissements de santé. L'article 4 de la décision soumet en particulier l'octroi d'une telle compensation à la conclusion d'un mandat devant préciser l'identité des entreprises concernées, la nature exacte, la durée et, s'il y a lieu, la portée géographique des obligations de service public imposées, tout droit exclusif ou spécial qui serait octroyé, et décrire le mécanisme de compensation ainsi que les paramètres de calcul de la compensation et ceux utilisés pour prévenir ou récupérer toute surcompensation éventuelle. Si l'article 7 de cette décision ne soumet à une obligation de publication que les compensations d'un montant supérieur à 15 millions d'euros, la commission considère que, dès lors qu'ils se rapportent à des financements publics, les montants des MIG et AC attribués aux établissements de santé, quel que soit le statut de ces derniers, public ou privé, sont communicables à toute personne qui en fait la demande. La commission considère ensuite que les stipulations des CPOM relatives aux orientations stratégiques destinées à décliner le PRS et le SROS (en l'espèce, les annexes 3, 4 et 5 du CPOM de la clinique Saint Jean), aux engagements des établissements de santé en matière d'innovation médicale et de recours, de retour à l'équilibre financier et en vue de la transformation de leurs actions de coopération, ainsi que les éléments relatifs aux missions de service public hospitalier et de soins ou de santé publique spécifiques assignés par l'ARS, et aux unités de soins palliatifs, sont également communicables, dès lors qu'elles se rapportent à la définition de l'organisation des soins sur le territoire. S'agissant des stipulations des CPOM relatives à l'organisation interne et aux objectifs fixés aux établissements de santé, la commission considère qu'il y a lieu d'opérer une distinction selon le statut de ces derniers. Bien que l’activité des établissements de santé s’inscrive dans un contexte de plus en plus concurrentiel, en particulier depuis la mise en place de la tarification à l’activité, la commission estime qu’il résulte des dispositions de l'article L6141-1 du code de la santé publique, selon lesquelles les établissements publics de santé sont des personnes morales de droit public dotées de l'autonomie administrative et financière et placées sous le contrôle de l'Etat, que les orientations stratégiques internes des établissements publics de santé, les transformations qu'ils s'engagent à opérer dans leurs activités, ainsi que les objectifs quantifiés des activités de soins et équipements lourds pour lesquels une autorisation a été délivrée sont des informations communicables à toute personne, sans que puisse être opposé le secret en matière commerciale et industrielle. S’agissant des établissements privés participant au service public hospitalier, ces informations ne sont communicables à toute personne que dans la mesure où elles se rapportent à cette mission de service public, et à l’exclusion des moyens humains qu’elle consacre à chaque activité, qui sont couverts par ce secret. Enfin, s’agissant des autres établissements privés liés aux agences régionales d’hospitalisation par un CPOM, la commission considère que les orientations stratégiques et les objectifs qui leur sont assignés au niveau de leur organisation et de leur gestion internes et le niveau de leur activité sont couverts par le secret en matière commerciale et industrielle. Il en va ainsi par exemple de l'annexe 1 sur le pilotage interne et de l'annexe 6 sur les indicateurs de pilotage du CPOM de la clinique Saint-Jean (à l'exception des indicateurs de performance qui doivent être publiés en application de l'article L6114-3 du code de la santé publique, s'ils sont identiques).