Avis 20154892 Séance du 19/11/2015
Communication, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, des documents conservés aux archives départementales du Rhône sous la cote 394 W : Cour de justice du Rhône : - 394 W/ 1, 5, 6, 13, 19 et 593 à 726 : dossiers émanant des juridictions d’exceptions à la Libération dans le ressort de la Cour d’appel de Lyon.
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 12 octobre 2015, à la suite du refus opposé par le directeur général des patrimoines à sa demande de communication, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, des documents conservés aux archives départementales du Rhône sous la cote 394 W : Cour de justice du Rhône : - 394 W/ 1, 5, 6, 13, 19 et 593 à 726 : dossiers émanant des juridictions d’exceptions à la Libération dans le ressort de la Cour d’appel de Lyon.
La commission note qu'en application du c) du 4° du I de l'article L213-2 du code du patrimoine, les documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions, sous réserve des dispositions particulières relatives aux jugements, et à l'exécution des décisions de justice, sont librement communicables à l'expiration d'un délai de soixante-quinze ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier ou d'un délai de vingt-cinq ans à compter de la date du décès de l'intéressé si ce dernier délai est plus bref. En l'occurrence, les dossiers demandés commencent en 1944 et vont pour certains d'entre eux jusqu'à 1968 ou 1982. Ces dossiers ne sont donc pas communicable sauf ceux dont on saurait que le principal intéressé est décédé depuis plus de vingt-cinq ans et qui ne contiendraient pas de documents relatifs à des tiers couverts par un des secrets protégés par la loi.
La commission observe en outre que les dossiers de procédure judiciaire instruits au moment de la Libération ont été exclus de la dérogation générale prise par arrêté conjoint des ministres de la culture et de l'intérieur du 29 avril 2002 et ouvrant à la communication la majorité des fonds d'archives publiques relatifs à la seconde guerre mondiale.
La commission relève que la demande de Madame X porte sur un ensemble extrêmement important de dossiers (139) émanant de la Cour martiale du Rhône, du tribunal militaire de la zone d'opérations de Saint-Etienne érigé en cour martiale, des commission de criblage du Rhône et de Roanne et surtout de la cour de justice de Lyon, section départementale de la Loire. Madame X a eu accès à l'inventaire du fonds 394 W, ce qui lui a permis d'affiner un peu sa demande en la ciblant sur les dossiers concernant la Loire. Toutefois, l'inventaire n'est pas nominatif et compte tenu du nombre de dossiers demandés, il est évident que la très grande majorité d'entre eux ne concernent pas son grand-père dont elle souhaite réhabiliter la mémoire. Madame X explique sa démarche par le fait qu'elle a besoin de connaitre tous les faits qui ont pu amener à l'arrestation et à l'exécution de son grand-père et notamment les témoignages reçus par un gendarme et les agissements de ce dernier.
La commission estime cependant que cette demande très large conduirait Madame X à consulter de nombreux dossiers sans rapport avec la disparition de son grand-père et contenant des secrets encore protégés par la loi concernant de nombreuses autres personnes.
Les Archives départementales du Rhône ont d'ailleurs informé la commission que, suite aux demandes répétées de Madame X, portant non seulement sur son grand-père, mais aussi sur d'autres membres de sa famille et des tiers, le service avait fait des recherches nominatives dans les index disponibles des fonds d'archives concernant la période et notamment dans l'index des personnes condamnées par la Cour de justice du Rhône et n'avait pas trouvé mention des personnes indiquées par le demandeur. Outre le fonds 394 W, trois autres fonds concernant les crimes de guerre, les fonds du Mémorial de l'oppression, celui du SRPJ et celui de la prison Montluc ont été numérisés, indexés et sont consultables en salle de lecture par les chercheurs, ainsi que sur Internet pour le dernier. Madame X a donc pu y avoir accès. Toutefois, les fonds de la période ne sont pas encore tous indexés. Les Archives départementales ont donc conseillé à Madame X de consulter les arrêts de la Cour de justice de Lyon, arrêts communicables, afin de retrouver la trace d'éventuels procès concernant les personnes qu'elle recherche et de préciser davantage sa demande, et ont constaté que Madame X suivait effectivement ce conseil.
La commission émet par suite, en l'état actuel de la législation, un avis défavorable à la demande de l'intéressée portant sur la communication de l'ensemble des dossiers 394 W 1, 5, 6, 13, 19, 593 à 726, communication qui porterait une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger.