Avis 20143360 Séance du 02/10/2014

Communication des dossiers d'autorisation de mise sur le marché et des étiquettes commerciales des produits suivants : 1) RAMPAR (numéro d'autorisation 8800099) ; 2) TECHN'ATRAL 50 LIQUIDE (numéro d'autorisation 7700181) ; 3) MANAGER (numéro d'autorisation 9000638) ; 4) INDIANA (numéro d'autorisation 9000055) ; 5) BUGGY PLUS (numéro d'autorisation 2020269) ; 6) MIKADO (numéro d'autorisation 9100297) ; 7) BANVEL FMP (numéro d'autorisation 8400093) ; 8) AMINUGEC (numéro d'autorisation 6600500) ; 9) LENTAGRAN 600 (numéro d'autorisation 9400027) ; 10) ALLIE (numéro d'autorisation 8400255) ; 11) ASULOX (numéro d'autorisation 6900313).
Maître XXX XXX conseil de l'association Phyto-Victimes et de Monsieur XXX a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 22 août 2014, à la suite du refus opposé par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt à sa demande de communication des dossiers d'autorisation de mise sur le marché et des étiquettes commerciales des produits suivants : 1) RAMPAR (numéro d'autorisation 8800099) ; 2) TECHN'ATRAL 50 LIQUIDE (numéro d'autorisation 7700181) ; 3) MANAGER (numéro d'autorisation 9000638) ; 4) INDIANA (numéro d'autorisation 9000055) ; 5) BUGGY PLUS (numéro d'autorisation 2020269) ; 6) MIKADO (numéro d'autorisation 9100297) ; 7) BANVEL FMP (numéro d'autorisation 8400093) ; 8) AMINUGEC (numéro d'autorisation 6600500) ; 9) LENTAGRAN 600 (numéro d'autorisation 9400027) ; 10) ALLIE (numéro d'autorisation 8400255) ; 11) ASULOX (numéro d'autorisation 6900313). En réponse à la demande qui lui a été adressée, le ministre de l'agriculture a informé la commission de ce que Maître XXX XXX avait adressé plusieurs demandes portant sur un nombre important de produits phytosanitaires auxquelles le ministère de l'agriculture n'est pas en mesure de répondre, compte tenu du nombre des produits en cause, de l'ancienneté des dossiers archivés dans des lieux différents, et de la nécessité de rendre illisibles, au cas par cas, les mentions relevant du secret industriel et commercial ; de ce qu'elle estimait que ces demandes, par leur nombre et leur caractère répétitif, pouvaient être considérées comme abusives ; enfin de ce qu'un dialogue avait été instauré entre la direction générale de l'alimentation et l'association Phyto-Victimes afin de préciser les demandes de cette dernière et d'y apporter une réponse adaptée. La commission souligne, tout d'abord, qu'une demande ne peut être considérée comme abusive que lorsqu'elle vise de façon délibérée à perturber le fonctionnement d'une administration. Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne de présenter plusieurs demandes à la même autorité publique ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives. En l'espèce, il ne lui est pas apparu, compte tenu de la nature des documents demandés, du destinataire de la demande et des éléments portés à sa connaissance, que cette demande présenterait un caractère abusif. Elle rappelle ensuite que, hormis le cas des demandes présentant un caractère abusif, le volume des documents demandés ne peut, par lui-même, justifier légalement un refus de communication. En revanche, l’administration est fondée, dans ce cas, à aménager les modalités de communication afin que l'exercice du droit d'accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services. Si la demande porte sur une copie de documents volumineux qu’elle n’est pas en mesure de reproduire aisément compte tenu de ses contraintes matérielles, l'administration est notamment en droit d'inviter le demandeur à venir consulter ces documents sur place et à emporter copie des seuls éléments qu’il aura sélectionnés. Alternativement, elle peut convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication compatible avec le bon fonctionnement des services. Elle observe qu’en vertu des dispositions de l’article L253-1 du code rural et de la pêche maritime, toute mise sur le marché, utilisation ou détention par l’utilisateur final de produits phytopharmaceutiques nécessite au préalable une autorisation de mise sur le marché (AMM), ou une autorisation de distribution pour expérimentation (ADE), délivrée par le ministre chargé de l’agriculture après avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments formulé à partir d’informations issues du dossier déposé par le demandeur de l’autorisation. Ainsi qu’elle l’avait exposé dans son avis n° 20081774 du 6 mai 2008, la commission considère qu’il y a lieu, pour apprécier la communicabilité des documents et informations figurant dans le dossier de demande, de distinguer trois types d’informations. 1.S’agissant des informations relatives à des émissions de substances dans l’environnement La commission estime que les informations qui se rapportent à l’impact de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques sur l’homme, la faune, la flore et les autres éléments de l’environnement constituent des informations relatives à des émissions de substances dans l’environnement au sens du II de l’article L124-5 du code de l’environnement. Ces dispositions, conformes aux termes du 2. de l’article 4 de la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement, prévoient qu’une autorité publique ne peut rejeter une demande portant sur de telles données que dans des cas limitativement et strictement énumérés, qui incluent la protection de la sécurité publique et celle des droits de propriété intellectuelle, mais non le secret de la vie privée ni le secret en matière commerciale et industrielle. La commission observe d’ailleurs que l’article 63 du règlement du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques prévoit que les règles relatives à la confidentialité des informations s’entendent, en la matière, sans préjudice des dispositions de la directive 2003/4/CE. 2.S’agissant des autres informations relatives à l’environnement La communication de ces informations peut être refusée dans les conditions prévues à l’article L124-4 du code de l’environnement, notamment lorsqu’elle porterait atteinte au secret de la vie privée, à la protection des personnes physiques ayant fourni l’information sans y être légalement contraintes, ainsi qu’au secret en matière industrielle et commerciale. En revanche, la circonstance qu’elle s’inscrirait dans un processus de décision en cours est sans incidence sur le droit d’accès de toute personne à ces informations. La commission observe que les limites du secret industriel et commercial sont tracées, s’agissant des produits phytopharmaceutiques, par les dispositions combinées de l’article L521-7 du code de l’environnement et des articles L253-2 et R. 253-15 du code rural. Ne sauraient ainsi être couverts par ce secret : le nom commercial et la teneur des substances chimiques et de toutes les substances dangereuses, la dénomination du produit phytopharmaceutique, le nom du producteur et du déclarant, les propriétés physico-chimiques du produit, les possibilités de rendre inoffensive la substance active ou le produit phytopharmaceutique, le résumé des résultats des essais destinés à établir l'efficacité du produit et son innocuité pour l'homme, les animaux, les végétaux et l'environnement, les méthodes et les précautions recommandées relatives à la manipulation, au stockage, au transport, à la prévention des incendies et des autres dangers que peut présenter le produit, aux méthodes d’analyses d’usage courant, aux méthodes d’élimination du produit et de son emballage, aux mesures de décontamination à prendre au cas où le produit serait répandu accidentellement ou en cas de fuite accidentelle et aux premiers soins et au traitement médical à appliquer en cas de lésions corporelles. S’appliquent en outre, depuis le 14 décembre 2009, les dispositions de l’article 63 du règlement du 21 octobre 2009, lequel, après avoir précisé que « Toute personne demandant que les informations soumises en application du présent règlement soient traitées de façon confidentielle est tenue d’apporter une preuve vérifiable démontrant que la divulgation de ces informations pourrait porter atteinte à ses intérêts commerciaux ou à la protection de sa vie privée et de son intégrité. », fixe une liste positive des informations dont la divulgation serait en principe considérée comme portant atteinte à la protection des intérêts commerciaux ou de la vie privée et de la sécurité des personnes, à savoir : « a) la méthode de fabrication ; b) la spécification d’impureté de la substance active, à l’exception des impuretés qui sont considérées comme importantes sur le plan toxicologique, écotoxicologique ou environnemental ; c) les résultats des lots de fabrication de la substance active comprenant les impuretés ; d) les méthodes d’analyse des impuretés présentes dans la substance active fabriquée, sauf les méthodes d’analyse des impuretés considérées comme importantes sur le plan toxicologique, écotoxicologique et environnemental ; e) les liens existant entre un producteur ou un importateur et le demandeur ou le titulaire de l’autorisation ; f) les informations sur la composition complète d’un produit phytopharmaceutique ; g) le nom et l’adresse des personnes pratiquant des essais sur les vertébrés ». Les autres informations ne sont couvertes par le secret en matière commerciale et industrielle que si le demandeur l’a expressément indiqué à l’autorité administrative et sous réserve, depuis l’entrée en vigueur du règlement du 21 octobre 2009, qu’il ait apporté à l’administration « une preuve vérifiable » du risque d’atteinte à ce secret invoqué. Par ailleurs, en vertu de l’article L. 124-4 du code de l’environnement, l’administration ne pourrait refuser la communication de ces informations, en dépit de leur « confidentialité », qu’après en avoir apprécié l’intérêt, notamment pour l’information du public et pour le demandeur. 3.S’agissant des autres documents et informations Ces documents, qui ne comportent pas d’informations relatives à l’environnement, sont soumis aux seules dispositions de la loi du 17 juillet 1978. Il en résulte que, tant qu’une décision n’a pas été prise sur la demande d’AMM, ces documents et informations figurant dans le dossier de demande revêtent un caractère préparatoire qui fait obstacle à leur communication en application du deuxième alinéa de l’article 2 de cette loi. Ils deviennent ensuite communicables après occultation des mentions couvertes par le secret en matière commerciale et industrielle, déterminées conformément aux règles rappelées au point 2. Dans ce cadre, l’administration est tenue de refuser la communication des données couvertes par ce secret. La commission émet, sous les réserves précédemment exposées, un avis favorable à la communication des documents sollicités et elle prend note de l'intention du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt de les communiquer selon les modalités qui seront définies avec l'association Phytovictimes.