Avis 20142298 Séance du 03/07/2014

Communication du rapport établi par les inspectrices du travail, Mesdames X X X et X X, sur les risques psychosociaux encourus par les salariés de l'établissement Amiens Nord de la société GOODYEAR DUNLOP TIRES France.
Maître X X, conseil du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'établissement Amiens Nord de la société GOODYEAR DUNLOP TIRES France, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 10 juin 2014, à la suite du refus opposé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Picardie - Unité territoriale de la Somme, à sa demande de communication du rapport établi par les inspectrices du travail, Mesdames X X X et X X, sur les risques psychosociaux encourus par les salariés de l'établissement Amiens Nord de la société GOODYEAR DUNLOP TIRES France. La commission rappelle que les documents élaborés par l'administration à l'intention de l'autorité judiciaire ou d'une juridiction ne revêtent pas le caractère de documents administratifs mais celui de documents judiciaires ou juridictionnels, lesquels n'entrent pas dans le champ d'application de la loi du 17 juillet 1978 et sur la communication desquels la commission n'est, par suite, pas compétente pour se prononcer. Il en va ainsi des rapports dressés par l'inspection du travail en vue de leur transmission au procureur de la République en application du code de procédure pénale. La commission ne serait donc pas compétente pour se prononcer sur la demande si elle devait être regardée comme tendant à la communication d'un rapport établi en vue de sa transmission au procureur de la République en application de l'article 40 du code de procédure pénale. La commission rappelle toutefois que la seule circonstance que des exemplaires d’un rapport établi par une autorité administrative ont été transmis à l’autorité judiciaire ne suffit pas à faire perdre à ce rapport le caractère de document administratif qu'il peut revêtir (CE 20 avril 2005, Comité d’information et de défense des sociétaires de la mutuelle retraite de la fonction publique, n°265308 ; CE 5 mai 2008, SA Baudin Châteauneuf, n°309518). Notamment, les rapports établis par l’inspection du travail dans le cadre d'une procédure administrative et non en vue de leur transmission à l'autorité judiciaire conservent le caractère de documents administratifs soumis au droit d'accès prévu par l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978, même dans le cas où ils sont en définitive transmis à cette autorité. Font alors toutefois obstacle à leur communication à des tiers les motifs énumérés à l'article 6 de la même loi. La commission précise à cet égard que, revenant sur sa doctrine antérieure, elle estime désormais, depuis son conseil n° 20131874 du 25 avril 2013 que le troisième tiret du II de l'article 6, qui ne permet de communiquer qu'à la personne directement concernée les documents révélant un comportement dont la divulgation pourrait lui porter préjudice vise, à la différence du deuxième tiret, les personnes morales aussi bien que les personnes physiques. En outre, selon le f du 2° du I du même article, ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte au déroulement des procédures engagée devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente. En l'espèce, la commission estime que les documents qui ont pu être établis par l'inspection du travail sans l'avoir été en vue de leur transmission à l'autorité judiciaire font nécessairement apparaître, compte tenu des conclusions qu'en a tirées ce service en saisissant le procureur de la République, de la part de l'entreprise ou de certains de ses agents, un comportement dont la divulgation pourrait leur porter préjudice. Elle émet donc un avis défavorable à leur communication à un tiers tel que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.