Avis 20164633 Séance du 17/11/2016

Communication du mémoire technique de la société SITA SUD OUEST, attributaire du lot n° 2 du marché public ayant pour objet l'exploitation du quai de transfert de Medis, le transport et le tri des matériaux recyclables issus de la collecte sélective.
Maître X, X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 29 septembre 2016, à la suite du refus opposé par le président de la communauté d'agglomération Royan Atlantique à sa demande de communication du mémoire technique de la société SITA SUD OUEST, attributaire du lot n° 2 du marché public ayant pour objet l'exploitation du quai de transfert de Medis, le transport et le tri des matériaux recyclables issus de la collecte sélective. En l'absence de réponse du président de la communauté d'agglomération Royan Atlantique à la date de sa séance, la commission rappelle que si le livre III du code des relations entre le public et l'administration garantit au profit des seuls administrés un droit d'accès aux documents administratifs et n'a pas vocation à régir la question des transmissions de documents entre les autorités administratives mentionnées à l’article L300-2 de ce code, la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique dispose en son article 1er que sous réserve des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2 dudit code sont tenues de communiquer, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les documents administratifs qu'elles détiennent aux autres administrations mentionnées au même premier alinéa de l'article L300-2 qui en font la demande pour l'accomplissement de leurs missions de service public. Elle rappelle également que le Conseil d'Etat a jugé dans son arrêt Société Armor SNC du 30 décembre 2014 (n°355563, au Recueil p. 433) que les collectivités territoriales ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent légalement se porter candidats à l'attribution d'un contrat de commande publique pour répondre aux besoins d'une autre personne publique si leur candidature constitue le prolongement d'une mission de service public dont la collectivité ou l'établissement public de coopération a la charge, dans le but notamment d'amortir des équipements, de valoriser les moyens dont dispose le service ou d'assurer son équilibre financier, et sous réserve qu'elle ne compromette pas l'exercice de cette mission En l'espèce, la commission constate que le Syndicat de valorisation des déchets ménagers de la Charente (CALITOM) forme sa demande de communication après avoir présenté une candidature à un marché public constituant un complément normal de sa mission statutaire. Elle s'estime, dès lors, compétente pour émettre un avis sur cette demande. La commission rappelle ensuite que, dans son avis contentieux du 8 novembre 2000, Société Jean-Louis Bernard Consultants (n° 222208, au Recueil p. 492), le Conseil d’État a considéré qu’aucun texte ni aucun principe n’interdit, en raison de sa nature, à une personne publique, de se porter candidate à l'attribution d'un marché public ou d'un contrat de délégation de service public. Le Conseil d’État a relevé notamment que, lorsqu’un établissement public exerce une activité susceptible d’entrer en concurrence avec celle d’entreprises privées, ses obligations fiscales sont comparables à celles d’une telle entreprise et que le statut social de ses salariés n'a ni pour objet, ni pour effet de le placer dans une situation nécessairement plus avantageuse que celle dans laquelle se trouve une entreprise. Le Conseil d’État a cependant précisé que, pour que soient respectées les exigences de l’égal accès aux marchés publics et de libre concurrence, d’une part, le prix proposé par la personne publique doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat, d’autre part, la personne publique ne doit pas bénéficier d’un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de sa mission de service public, enfin, elle doit pouvoir, si nécessaire, en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d’information. La commission estime toutefois qu’il ne ressort ni des termes mêmes de cet avis, ni des conclusions du commissaire du gouvernement, publiées au recueil, que le Conseil d’État ait entendu faire peser, à la charge de l’administration adjudicatrice ou de la personne publique attributaire du marché, au titre de la communication des documents administratifs, des obligations plus larges que celles qui résultent du livre III du code des relations entre le public et l’administration ou de textes spéciaux, visés à l'article L342-2 du code des relations entre le public et l’administration, tel l’article L5211-46 du code général des collectivités territoriales. La commission rappelle en outre qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les candidats non retenus que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret en matière industrielle et commerciale, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’Etat du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret en matière commerciale et industrielle et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’Etat a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret commercial ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi du bordereau des prix unitaires. L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret en matière commerciale et industrielle conduit ainsi la commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises. La commission rappelle cependant que l'article L124-2 du code de l'environnement qualifie d'informations relatives à l'environnement toutes les informations disponibles, quel qu'en soit le support, qui ont notamment pour objet : « 1º L'état des éléments de l'environnement, notamment l'air, l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages, les sites naturels, les zones côtières ou marines et la diversité biologique, ainsi que les interactions entre ces éléments ; 2º Les décisions, les activités et les facteurs, notamment les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements, les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets, susceptibles d'avoir des incidences sur l'état des éléments visés au 1º ; 3º L'état de la santé humaine, la sécurité et les conditions de vie des personnes, les constructions et le patrimoine culturel, dans la mesure où ils sont ou peuvent être altérés par des éléments de l'environnement, des décisions, des activités ou des facteurs mentionnés ci-dessus (….) ». Selon les articles L124-1 et L124-3 du même code, le droit de toute personne d'accéder à des informations lorsqu'elles sont détenues, reçues ou établies par les autorités publiques ou pour leur compte, s'exerce dans les conditions définies par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 précisent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement. En l’espèce, la commission estime que les documents sollicités contiennent des informations relatives à l'environnement, relevant par suite du champ d'application de ces dispositions. Elle rappelle en outre que, si les dispositions des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, auxquelles renvoie l’article L124-4 du code de l’environnement, ne permettent pas la communication de documents lorsque celle-ci porterait notamment atteinte au secret en matière commerciale et industrielle, il en va autrement lorsque les documents sollicités comportent des informations relatives à des émissions dans l’environnement. Dans ce cas, une demande de communication ne peut être rejetée que pour les motifs suivants : atteinte aux relations internationales, à la sécurité publique ou à la défense nationale, atteinte au déroulement des procédures juridictionnelles et à la recherche des infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales et atteinte à des droits de propriété intellectuelle. La commission considère que, dès lors que les documents sollicités sont détenus par l’administration dans le cadre de ses missions de service public, ils constituent des documents administratifs communicables et dans leur intégralité à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et des articles L124-1 et suivants du code de l'environnement. En particulier, dans la mesure où ils sont susceptibles de comporter des informations relatives à des émissions dans l'environnement, il résulte du II de l'article L124-5 de ce code qu'ils sont communicables, sans que puissent être occultées d'éventuelles mentions couvertes par le secret industriel et commercial. Elle émet donc un avis favorable à la communication des documents demandés sous réserve de l'occultation préalable des mentions couvertes par le secret en matière industrielle et commerciale qui ne constitueraient pas des informations relatives à l'environnement.