Avis 20213433 Séance du 22/07/2021

Communication par voie électronique à son adresse e-mail, dans le cadre d'un travail de recherche pour la rédaction d'une thèse consacrée aux administrateurs provisoires de biens dits « israélites » entre 1940 et 1944, du fichier nominatif alphabétique général (regroupant toutes les affaires classées sans suite, non lieu ou jugées par les Cours de justice et chambres civiques du ressort de la Cour d'appel de Toulouse) numérisé et conservé sous les cotes AD 31 5846 W 437 à 445, l' administration proposant la seule consultation en salle de lecture.
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 mai 2021, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental de la Haute-Garonne à sa demande de communication par voie électronique à son adresse e-mail, dans le cadre d'un travail de recherche pour la rédaction d'une thèse consacrée aux administrateurs provisoires de biens dits « israélites » entre 1940 et 1944, du fichier nominatif alphabétique général (regroupant toutes les affaires classées sans suite, non lieu ou jugées par les Cours de justice et chambres civiques du ressort de la Cour d'appel de Toulouse) numérisé et conservé sous les cotes AD 31 5846 W 437 à 445, l'administration proposant la seule consultation en salle de lecture. La commission relève qu’en réponse à la demande qui lui a été adressée, le président du conseil départemental de la Haute-Garonne lui a indiqué que le fichier demandé, qui identifie les affaires portées devant la Cour de justice et les chambres civiques du ressort de la Cour d'appel de Toulouse, au titre de la période comprise entre 1944 et 1951, ne présente pas les caractéristiques d’un instrument de recherche, dès lors qu’il n’a pas été élaboré par les services d’archives publics, mais qu’il se compose d’une suite de fiches produites et versées par la Cour d’appel de Toulouse dans le cadre de ses fonctions juridictionnelles, qui ont été numérisées puis classées par ordre alphabétique. La commission comprend que ces fiches, plus détaillées que les instruments de recherche élaborés par les services publics d'archives, indiquent les nom, prénom, âge, profession des personnes poursuivies, parfois même leur adresse, les faits reprochés, les principales étapes de la procédure ainsi que, dans certains cas, la condamnation prononcée. La commission rappelle qu’en application des dispositions du c) du 4° et du 5° du I de l’article L213-2 du code du patrimoine, les documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions, dont relève le fichier demandé, deviennent librement communicables à l’expiration d’un délai de soixante-quinze ans à compter de la date du document ou du document le plus récent inclus dans le dossier, ou d’un délai de vingt-cinq ans à compter de la date du décès de l’intéressé si ce dernier délai est plus bref. Ce délai est porté à cent ans à compter de la date du document ou vingt-cinq ans à compter du décès de l'intéressé, lorsque le document se rapporte à une personne mineure. En l’espèce, la commission relève que certaines informations contenues dans le fichier demandé, compte tenu de la période couverte, ne sont pas encore librement communicables, en application des dispositions précitées. Elle constate cependant que l'arrêté du 24 décembre 2015, pris en application de l’article L213-3 du code du patrimoine, par dérogation aux délais légaux de communicabilité des archives publiques précisées à l’article L213-2 du même code, a autorisé la libre consultation des archives relatives à la Seconde Guerre mondiale, et notamment des documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions d’exception instaurées par le Gouvernement provisoire de la République française. Le fichier demandé est couvert par cet arrêté. La commission relève que la demande porte, en l’espèce, sur les modalités d’accès à ce fichier, le demandeur en sollicitant la communication, alors que l’administration saisie lui propose la seule consultation, sur place. La commission rappelle que les autorisations de consultation par dérogation aux délais légaux de communicabilité, qu’elles soient individuelles ou générales comme ici, n’entraînent pas de droit automatique à la reproduction ou à la transmission des documents. L’administration des archives peut toutefois, sur demande expresse, consentir à d’autres modalités d’accès que la consultation, suivant une procédure identique à l’autorisation de consultation par dérogation définie à l’article L213-3 du code du patrimoine, après accord de l’autorité dont émane les documents. La commission déduit de ces éléments que la communication du fichier nominatif alphabétique général regroupant les affaires portées devant la Cour de justice et les chambres civiques du ressort de la Cour d'appel de Toulouse n’est pas de droit et qu’il appartient à Monsieur X de déposer une demande formelle en ce sens, qui sera étudiée par l’administration selon les procédures habituelles. La commission précise qu’afin de déterminer s’il y a lieu ou non de faire droit à cette demande, il appartiendra à l’autorité saisie de mettre en balance les différents intérêts en présence à savoir, d’une part, l’intérêt légitime du demandeur et d’autre part, les intérêts que la loi a entendu protéger. La pesée de l’un et des autres s’effectue en tenant compte de l’écoulement du temps ainsi que, le cas échéant, de la circonstance que ces documents ont déjà fait l’objet d’une autorisation de consultation anticipée ou ont été rendus publics. L'examen de la demande peut aussi conduire à prendre en considération la capacité du demandeur à respecter la confidentialité des informations qui lui seront communiquées, l’impossibilité pour lui de consulter les documents sur place ou encore la nécessité de préserver la conservation et à l'intégrité physique des documents demandés. En l’espèce, la commission relève que le fichier demandé se rapporte à des documents concernant une période emblématique de l’histoire, dont l’étude est encouragée par l’arrêté du 14 décembre 2015. Elle note, par ailleurs, que le demandeur justifie de la nature et du sérieux de ses travaux de recherche, consacrés aux administrateurs provisoires de biens israélites entre 1940 et 1944. Ce dernier s’est également engagé à respecter la confidentialité du fichier demandé, qu’il entend utiliser dans le seul but d’identifier les fonds d’archives utiles à ses recherches en vue de leur consultation ultérieure, et qui sont conservés dans trente-et-un services différents. La commission rappelle, enfin, comme indiqué précédemment, que le fichier demandé se rapporte à un fonds d’archives qui a fait l’objet d’une ouverture anticipée par l’arrêté du 24 décembre 2015. Elle relève que les délais d’incommunicabilité prévus par l’article L213-2 du code du patrimoine s’ils ne sont pas écoulés pour l’ensemble des affaires mentionnées dans ce fichier, le sont pour la plupart et en grande partie, pour les autres. Compte tenu de ces éléments, elle estime que la communication de ce fichier, qui présente un intérêt tout particulier pour Monsieur X, ne conduirait pas, en l’espèce, à porter atteinte aux intérêts que la loi a entendu protéger, en particulier au secret relatif aux affaires portées devant la Cour de Justice et les chambres civiques du ressort de la Cour d'appel de Toulouse, et à la protection de la vie privée des personnes physiques poursuivies devant ces juridictions. Sous réserve d'une autorisation particulière de communication selon la procédure légale en vigueur, la commission émet, dès lors, un avis favorable à la demande de Monsieur X.