Avis 20192345 Séance du 28/11/2019

Communication de l'entier dossier administratif de son client, mineur étranger isolé, pris en charge par le département à la suite de la procédure judiciaire au niveau pénal et civil engagée par le département qui conteste le statut de mineur isolé de son client.
Maître X, conseil de Monsieur X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 29 avril 2019, à la suite du refus opposé par le président du conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques à sa demande de communication de l'entier dossier d'aide sociale à l'enfance de son client, pris en charge par le département avant qu'une procédure judiciaire soit initiée par l'autorité départementale pour contester le statut de mineur isolé de son client. La commission rappelle qu’aux termes des articles L222-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles (CASF), le président du conseil départemental peut, « sans préjudice des pouvoirs reconnus à l’autorité judiciaire », accorder des prestations d’aide sociale à l’enfance, en particulier l’aide à domicile (article L222-2 du CASF) et le « placement administratif » (article L222-4-2 du CASF), ce dernier ne pouvant être réalisé qu’avec l’accord des parents. Tout mineur accueilli hors du domicile de ses parents est placé sous la protection du président du conseil départemental. Lorsqu’un mineur est en danger et que les mesures administratives n’ont pas permis de remédier à la situation, ou que les parents s’opposent à ces mesures (en particulier au placement), le président du conseil départemental doit, en vertu de l’article L226-4 du CASF, en aviser sans délai le procureur de la République. Ce dernier peut, en cas d’urgence, ordonner le placement provisoire de l’enfant et doit alors saisir le juge des enfants dans un délai de huit jours (article 375-5 du code civil). Parallèlement, le juge des enfants peut être saisi par les parents ou les services d’aide sociale à l’enfance, voire se saisir d’office à titre exceptionnel, et ordonner des mesures d’assistance éducative (article 375 du code civil). La décision fixe la durée de la mesure sans que celle-ci puisse, lorsqu'il s'agit d'une mesure éducative exercée par un service ou une institution, excéder deux ans. La mesure peut être renouvelée par décision motivée. L’article 375-6 du code civil permet au juge des enfants, à tout moment, de modifier ou de rapporter ses décisions d’office ou à la requête d’un tiers intéressé. Durant toute la durée du placement judiciaire, le mineur est placé sous la protection conjointe du président du conseil départemental et du juge des enfants (article L227-2 du CASF). La commission rappelle également que le caractère communicable des pièces qui composent le dossier d’aide sociale à l’enfance dépend de l’état de la procédure et de l’objet en vue duquel elles ont été élaborées. L’ensemble des pièces qui composent le dossier détenu par les services d’aide sociale à l’enfance avant que le juge des enfants soit saisi ou que le procureur de la République soit avisé en application des dispositions mentionnées ci-dessus revêtent un caractère administratif. Il en va ainsi, en particulier, des documents relatifs au placement administratif du mineur. Lorsque le juge des enfants a été saisi ou que le procureur de la République a été avisé, les documents élaborés dans le cadre de la procédure ainsi ouverte, y compris le courrier de saisine ou d’information et la décision du juge des enfants ou du procureur de la République, constituent des documents judiciaires exclus du champ d’application du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration. La commission n’est donc pas compétente pour se prononcer sur leur caractère communicable. La commission estime en conséquence qu'il convient de distinguer, parmi les pièces du dossier d’aide sociale à l’enfance d'un mineur étranger isolé, les documents élaborés à l'intention de l'autorité judiciaire, qui ne revêtent pas de caractère administratif, des autres documents élaborés par les autorités administratives qui, même s'ils ont été transmis au juge pour information, conservent un caractère administratif. Pourront notamment être communiqués au demandeur ou à son conseil les documents qui, soit, n'ont pas été transmis à l'autorité judiciaire soit, bien que transmis à l'autorité judiciaire, n'avaient pas été élaborés en vue de cette transmission, sous réserve de la disjonction des pièces ou de l'occultation des mentions qui révèleraient de la part de personnes physiques nommément désignées ou facilement identifiables, autres que l'intéressé lui-même, un comportement dont la divulgation leur porterait préjudice ainsi que des mentions dont la communication porterait atteinte au secret professionnel garanti par l'article L221-6 du code de l'action sociale et des familles. Il n'appartient en revanche pas à la commission de se prononcer sur la communication des pièces qui présentent effectivement un caractère judiciaire. Les documents qui, en application de ces règles, revêtent un caractère administratif, sont communicables dans les conditions et sous les réserves prévues par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration. Doivent ainsi être soustraits à la communication ou occultés les documents et mentions faisant apparaître le comportement de tierces personnes (en particulier le ou les mineurs concernés) et dont la divulgation pourrait leur porter préjudice (plaintes, dénonciations, etc.), en application de l’article L311-6 du même code. En l'espèce, en réponse à la demande qui lui a été adressée, le président du conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques a informé la commission que les pièces contenues dans le dossier de Monsieur X, élaborées dans le cadre de l'évaluation de sa minorité, ont été transmises à l'autorité judiciaire. La commission en prend note et se déclare incompétente pour se prononcer sur la communication de ces documents qui revêtent un caractère judiciaire. Le président du conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques a ajouté que Monsieur X n'a pas été confié au service de l'aide sociale à l'enfance, puisque déclaré majeur par les juridictions judiciaires, de sorte qu'aucun autre document administratif n'est détenu ses services. La commission en prend acte et déclare le surplus de la demande sans objet, en tant que concernant des documents inexistants. Elle s'étonne cependant qu'aucun document n'ait été élaboré par l'autorité administrative avant la saisine des autorités judiciaires, lesquels seraient communicables à l'intéressé et à ses conseil, selon les modalités évoquées précédemment.