Avis 20130259 Séance du 07/02/2013

Communication du dossier 90 APC 44 concernant son demi-fère XXX XXX.
Madame XXX XXX a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 7 janvier 2013, à la suite du refus opposé par la ministre de la culture et de la communication à sa demande de communication du dossier conservé aux archives nationales d'outre-mer sous la cote 90 APC 44, concernant son demi-frère XXX XXX, né en 1947 et décédé en 1994. La commission constate qu'il s'agit d'un dossier d'archives émanant de la Fédération des œuvres de l'enfance française d'Indochine, association dissoute en 1983, qui avait pour objet statutaire « l'éducation et le placement des enfants français abandonnés ou moralement délaissés » en Indochine. A l'occasion de son conseil n° 20012610 du 12 juillet 2001 sur la communication des dossiers de pupille constitués par cet organisme, la commission n'avait pu se déterminer, faute d'éléments suffisants, sur le caractère de service public éventuel de la mission de cette association. La commission rappelle à cet égard que le Conseil d'État, dans sa décision CE, Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés, a jugé qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public. Toutefois, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission. En l’espèce, la commission estime que l'intérêt général qui s'attachait à l'activité de la Fédération des œuvres de l'enfance française d'Indochine fait d'autant moins de doute que cette association avait été reconnue d'utilité publique en 1950 et qu'un rapport de l'inspection générale des finances, en 1968, a considéré que sa mission, exercée en Indochine, était « identique à celle des services de l'aide sociale en ce qui concerne les jeunes métropolitains (ex-Assistance publique) ». La commission constate par ailleurs que cette association a été créée, en 1939, par le gouverneur général de l'Indochine française. Il paraît en outre probable, dans ce contexte, qu'une grande partie des ressources de l'association ait été d'origine publique. Dans ces conditions, bien que manquent à son dossier des informations utiles sur certains des critères énoncés par la décision du Conseil d'Etat du 22 février 2007, en particulier sur les modalités de contrôle de l'activité de l'association par l'administration, la commission considère que sont réunis suffisamment d'indices concordants pour que la Fédération des œuvres de l'enfance française d'Indochine puisse être regardée comme ayant été chargée d'une mission de service public. Les documents qui procédaient de l'activité de l'association, dans le cadre de cette mission de service public, notamment les dossiers de ses pupilles, ont ainsi le caractère, défini à l'article L. 211-4 du code du patrimoine, d'archives publiques, dont le régime de communication est fixé aux articles L. 213-1 à L. 213-5 du code du patrimoine. Dans la mesure où la communication du dossier d'un pupille est susceptible de porter atteinte à sa vie privée ou à celle de ses proches, il n'est communicable à toute personne qui le demande qu'à l'expiration du délai de cinquante ans à compter de la date du document le plus récent qui s'y trouve inclus, fixé au 3° du I de l'article L. 213-2 du même code. En l'espèce, la pièce la plus récente du dossier datant de 1966, ce dossier d'archives sera librement communicable à compter de 2016. Jusqu'à cette date, il n'est pas communicable aux tiers, sauf autorisation de consultation anticipée donnée dans les conditions prévues à l'article L. 213-3 de ce code. La commission émet donc un avis défavorable à la demande de communication de Madame XXX, qui n'a pas sollicité auprès des archives nationales d'outre-mer de dérogation sur le fondement de l'article L. 213-3 du code du patrimoine et à laquelle il appartient, si elle entend persévérer dans sa démarche, de présenter une telle demande.