Avis 20215099 Séance du 23/09/2021

Communication du contrat de partenariat passé avec la société X pour le développement et l'exploitation du parc éolien de Saint-Maurice-des- Lions : 1) l'acte d'engagement ; 2) le prix global de l'offre ; 3) les prestations proposées par l'attributaire ; 4) la lettre ou le règlement de consultation.
Madame X, pour l'Association X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 2 août 2021, à la suite du refus opposé par le président de la société d'économie mixte Gaz et Electricité de Grenoble (SEM GEG) à sa demande de communication du contrat de partenariat passé avec la société X pour le développement et l'exploitation du parc éolien de Saint-Maurice-des- Lions : 1) l'acte d'engagement ; 2) le prix global de l'offre ; 3) les prestations proposées par l'attributaire ; 4) la lettre ou le règlement de consultation. En l'absence de réponse du président de la société d'économie mixte Gaz et Electricité de Grenoble (SEM GEG) à la date de sa séance, la commission rappelle en premier lieu qu'aux termes de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission (...) ». Elle précise également, s'agissant des sociétés d'économie mixte ou des sociétés publiques locales, que le Conseil d'État, dans sa décision CE, Sect., 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés, n° 264541, a jugé qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public. Toutefois, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission. La commission en déduit que, lorsqu'une société d'économie mixte (SEM) ou une société publique locale (SPL) est chargée d'une mission de service public, les documents qu'elle élabore ou détient ne constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration que si leur objet les rattache directement à l'exécution de la mission de service public qui lui a été confiée. En l'espèce, elle relève qu'aux termes de l'article L121-1 du code de l'énergie : « Le service public de l'électricité a pour objet de garantir, dans le respect de l'intérêt général, l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire national. Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l'indépendance et à la sécurité d'approvisionnement, à la qualité de l'air et à la lutte contre l'effet de serre, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d'énergie, à la compétitivité de l'activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d'avenir, comme à l'utilisation rationnelle de l'énergie ». La société d’économie mixte locale dénommée « Gaz Electricité de Grenoble » (GEG) doit ainsi être regardée en sa qualité de distributeur d’électricité comme chargée d’une mission de service public. La commission observe en outre que le contrat sollicité a pour objet le développement et l'exploitation du parc éolien. Elle estime en conséquence, comme elle a déjà pu l'indiquer dans son avis n° 20195190 du 16 janvier 2020, que ce contrat s'inscrit dans la mission de service public de cette société et constitue en conséquence un document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration. La commission rappelle en deuxième lieu, qu'une fois signés, les contrats de la commande publique et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication. Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi du bordereau des prix unitaires. L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution. L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas. En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants : - les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ; - dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres. La commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables. La commission relève, en troisième lieu, que les contrats de partenariat sont devenus des marchés public de partenariat désormais régis par le livre II de la 2ème partie du code de la commande publique (art L 2200-1 et suivants ainsi que R2200-1 et suivants). Il en ressort que le marché de partenariat permet à un pouvoir adjudicateur ou à une entité adjudicatrice, de confier à un opérateur économique ou à un groupement d'opérateurs économiques une mission globale ayant pour objet, d'une part, la construction, la transformation, la rénovation, le démantèlement ou la destruction d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public ou à l'exercice d'une mission d'intérêt général, et d'autre part, tout ou partie de leur financement. En outre cette mission globale peut également avoir pour objet tout ou partie de la conception des ouvrages, équipements ou biens immatériels, l'aménagement, l'entretien, la maintenance, la gestion ou l'exploitation d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels ou une combinaison de ces éléments ou encore la gestion d'une mission de service public ou des prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée. Ainsi, le contenu des marchés de partenariat est par nature très étoffé : ces contrats comportent de nombreuses clauses dans lesquelles sont décrits avec précision les éléments financiers, juridiques, techniques et fonctionnels. En effet, le contrat comprend : - des données relatives à la structuration juridique, financière et à ses conséquences fiscales (il s’agit par exemple des clauses relatives à la fiscalité, à la publicité foncière, aux garanties et assurances, à la modification de l’actionnariat ou encore au plan de financement) ; - des données relatives aux coûts des travaux, délais et plannings de construction (il s’agit des clauses relatives aux montants des investissements, aux délais d’exécution, au pourcentage des travaux confiés à des PME, à la prise de possession par la personne publique) ; - enfin, des données relatives aux prix, marges et prises de risque du partenaire privé (il s’agit des clauses relatives aux indemnités, loyers, sanctions, pénalités, clauses résolutoires, résiliation, survenance du terme, augmentation des coûts de financement, effets des modifications imposées par les changements dans la législation, causes légitimes). Ces informations, qui comportent une très forte valeur ajoutée, reflètent le montage juridico-financier et comptable que le partenaire privé a imaginé et mis au point pour répondre au mieux aux besoins exprimés par la personne publique et traduisent un savoir faire propre. Au regard de ces éléments, la commission considère que si le marché de partenariat constitue un document administratif et est, à ce titre, soumis au droit d’accès garanti par l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, à l’exclusion des mentions couvertes par le secret des affaires, ce secret implique d’occulter, dans le contrat lui-même et ses annexes, les mentions qui définissent le montage juridico-financier et comptable ainsi mis au point par le partenaire retenu. Compte tenu de ces éléments, la commission estime que les documents administratifs sollicités, s'ils existent, sont en principe communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous la réserve rappelée tenant à la préservation du secret des affaires. Elle émet, sous cette réserve un avis favorable.