Conseil 20200512 Séance du 14/05/2020

Possibilité de consulter, par les associations environnementales, l'intégralité d'un dossier d'indemnisation des personnes physiques ou morales ayant subi des dommages causés par des animaux protégés dans le cadre de leur activité agricole : 1) les constats de dommages rédigés par l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) servant de base au calcul de l'indemnité ; 2) les courriers de notification des indemnisations avec mentions des montants et du détail des calculs de l'indemnité ; 3) les mentions relatives aux données personnelles sachant que chaque dossier est nominatif et comporte le numéro SIRET, le numéro d'élevage, le total du cheptel, le nombre d'animaux impactés par éleveur et par groupement pastoral, les causes des dommages.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 14 mai 2020 votre demande de conseil relative à la possibilité de consultation, par les associations environnementales, de l'intégralité d'un dossier d'indemnisation de personnes physiques ou morales ayant subi des dommages causés par des animaux protégés dans le cadre de leur activité agricole : 1) les constats de dommages rédigés par l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) servant de base au calcul de l'indemnité ; 2) les courriers de notification des indemnisations avec mention des montants et du détail des calculs ; 3) les mentions relatives aux données personnelles, sachant que chaque dossier est nominatif et comporte le numéro SIRET, le numéro d'élevage, le total du cheptel, le nombre d'animaux impactés par éleveur et par groupement pastoral, les causes des dommages. La commission rappelle, d'une part, qu’en vertu des 1°) et 3°) de l’article L124-2 du code de l’environnement, sont notamment considérées comme étant relatives à l’environnement, les informations qui ont pour objet l’état de la diversité biologique ainsi que celles se rapportant aux conditions de vie des personnes lorsqu’elles sont ou peuvent être altérées par les éléments de l’environnement. Elle relève, par ailleurs, que le loup, l'ours et le lynx font partie de la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire national, qui a été établie par arrêté du 23 avril 2007, pris en application des dispositions des articles L411-1 et suivants du code de l’environnement. Elle rappelle, d'autre part, que la liste des bénéficiaires d'aides versées par une personne publique et comportant le montant de ces aides, dès lors qu'elle existe ou peut être établie par un traitement automatisé d'usage courant, constitue un document administratif entrant dans le champ d'application de la loi du 17 juillet 1978 codifiée au livre III du code des relations entre le public et l'administration. Pour les aides versées en considération de la situation d'une personne physique ou dont le calcul est fonction de celle-ci, par exemple une bourse ou un secours, la commission estime que le secret de la vie privée fait obstacle à la communication de la liste des bénéficiaires de telles aides et du montant des aides perçues par chacun. En revanche, lorsqu'il s'agit d'aides versées pour l'exercice d'une activité économique ou culturelle ou encore pour améliorer l'état de l'environnement, indépendamment de la situation personnelle d'une personne physique, la commission estime que le nom des bénéficiaires de ces aides, que ce soient des personnes physiques ou des personnes morales, n'est pas couvert par le secret de la vie privée ni par le secret des affaires. Il en va de même du montant de l'aide perçue, sous réserve que la révélation de ce montant ne permette pas d'en déduire une information couverte par le secret en matière industrielle et commerciale telle que le montant du chiffre d'affaires ou celui d'un investissement. (avis n° 20055081). S'agissant du caractère communicable de l'intégralité d'un dossier d'indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l'ours et le lynx, la commission relève qu’il résulte de l’article 1er du décret n° 2019-722 du 9 juillet 2019, qu’un régime d’aide d’État spécifique a été mis en place pour remédier aux dommages causés par des animaux protégés en France. Dans ce cadre, les personnes physiques ou morales exerçant une activité agricole au sens de l'article L311-1 du code rural et de la pêche maritime peuvent déposer auprès du préfet de département du lieu de survenance du dommage une demande d'indemnisation. Cette demande est instruite sur la base d’un constat dressé par un agent de l’office national de la chasse et de la faune sauvage à partir d’un formulaire-type permettant de relever l'ensemble des éléments factuels nécessaires à l'appréciation de la responsabilité du prédateur dans le dommage et à l'indemnisation. Enfin, le préfet décide de l’indemnisation d’une attaque en fonction des éléments techniques figurant dans ce constat, l’évaluation de l’indemnité étant déterminée selon des montants forfaitaires fixés par l’arrêté du 9 juillet 2019 pris pour l’application du décret du même jour. La commission déduit de ce dispositif d’aide publique que le dossier de demande d’indemnisation déposé par une personne physique ou morale constitue un document administratif soumis au droit d'accès prévu par l’article L124-1 du code de l’environnement, sous réserve de la protection des intérêts énoncés au I de l’article L124-4 du même code. A ce titre, la commission, qui a pris connaissance des éléments constitutifs d’un dossier d’indemnisation, estime que les constatations opérées par l’ONCFS (notamment les causes des dommages et le nombre d’animaux ouvrant droit à indemnisation), alors même que celles-ci figureraient dans des dossiers individuels constitués pour chaque éleveur victime, le décompte de l’indemnité notifié aux éleveurs comme les ordres de paiement, sont communicables, sous réserve toutefois de l’occultation, en application du 1°) du I de l’article L124-4 du code de l’environnement, des mentions dont la communication porterait atteinte à la vie privée des éleveurs concernés ou au secret en matière commerciale et industrielle devenu secret des affaires (adresse, numéro de téléphone de l’éleveur, taille du troupeau, relevé d’identité bancaire). En revanche, la commission, revenant partiellement sur sa position antérieure (avis n° 20134403), estime que ces dispositions ne font pas obstacle à la communication des mentions relatives au numéro du cheptel ou des boucles des animaux concernés par l’attaque. La commission précise, enfin, qu'au terme d'une appréciation de l’intérêt d’une communication au regard de la protection de l’environnement, en l’espèce la préservation d’une espèce protégée, elle estime que la désignation précise du lieu du dommage n’a pas à être communiquée à des tiers. Elle considère en conséquence que doivent être occultées avant communication les références de l'unité pastorale de survenance du dommage du formulaire d'indemnisation, ainsi que, le cas échéant, les pièces fournies par l'éleveur à l'appui de sa demande qui feraient apparaître ce lieu, telles que, dans le dossier que vous avez soumis à la commission, une carte issue du géoportail à petite échelle désignant ce lieu ou les coordonnées (longitude ; latitude) reportées manuellement sur le formulaire d'indemnisation.