Avis 20183477 Séance du 06/12/2018

Communication, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, dans le cadre de la préparation d'une thèse sur les Kurdes de Turquie dans l'ouest de la France et en Wallonie depuis les années 1970, des documents conservés aux archives départementales du Morbihan sous les cotes : 1) 1057 W 1 à 15, 19 à 21, 26 à 27 : préfecture du Morbihan-cabinet ; 2) 1225 W 126 à 130 : préfecture du Morbihan-cabinet ; 3) 1526 W 137, 146 : direction départementale des renseignements généraux.
Madame X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 21 juin 2018, à la suite du refus opposé par le directeur chargé des Archives de France à sa demande de communication, par dérogation aux délais fixés par l'article L213-2 du code du patrimoine, dans le cadre de la préparation d'une thèse sur les Kurdes de Turquie dans l'ouest de la France et en Wallonie depuis les années 1970, des documents conservés aux archives départementales du Morbihan sous les cotes : 1) 1057 W 1 à 15, 19 à 21, 26 à 27 : préfecture du Morbihan-cabinet ; 2) 1225 W 126 à 130 : préfecture du Morbihan-cabinet ; 3) 1526 W 137, 146 : direction départementale des renseignements généraux. En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur chargé des Archives de France a informé la commission que, tenu par le I de l'article L213-3 et par l'article L213-4 du code du patrimoine, il ne pouvait accorder de consultation par dérogation aux délais de ce même code sans l'accord de l'autorité dont émanent les documents, en l'espèce le préfet du Morbihan, lequel estime que la communication des dossiers refusés porterait une atteinte excessive aux intérêts que la loi entend protéger, en particulier le secret de la vie privée d'individus explicitement nommés et toujours en vie. La commission prend note que le directeur des Archives de France estime préférable de maintenir le refus de communication à ce titre et compte tenu que l'intéressée a obtenu satisfaction sur la majeure partie de sa demande de dérogation. La commission constate que la demande est faite dans le cadre d'un travail universitaire de doctorat portant sur la question des réfugiés kurdes de Turquie et de leur accueil dans l'ouest de la France et en Wallonie. Elle relève que les documents mentionnés au point 1), issus du cabinet de la préfecture, contiennent des dossiers de demandes de cartes de séjour, de naturalisations ou encore de visas d'entrée en France, courant de 1966 à 1975. Si en vertu du 3° du I de l'article L213-2 du code du patrimoine, ces documents ne sont pas consultables avant l'expiration d'un délai de cinquante ans à compter de leur date, la commission remarque que Madame X a obtenu une dérogation pour seize autres versements en provenance de la préfecture du Morbihan et contenant des dossiers strictement similaires courant jusqu'à 2002. Elle s'étonne dès lors que l'administration, consultée également pour ces autres références, accorde une dérogation pour des dossiers nominatifs aussi récents et refuse l'accès à des dossiers similaires plus anciens. Les documents référencés au point 2), de même provenance et datés de 1978 à 1987, ont été produits par la police de l'air et des frontières et sont constitués de statistiques ou de dossiers portant sur la lutte contre le trafic de main-d'œuvre étrangère, les reconduites à la frontière ou les étrangers en situation irrégulière. Comme pour le point précédent, la commission ne peut que constater que Madame X a obtenu un accord de l'administration pour consulter des dossiers abordant des questions similaires, telles les cotes 1526 W 135 et 147, s'étendant de 1944 à 1992, et contenant également des statistiques sur les étrangers ou des informations sur des ressortissants déboutés du droit d'asile. La commission estime ici encore que la nature des documents auxquels Madame X a pu avoir accès, dans le Morbihan comme dans d'autres départements voisins (Finistère, Côtes-d'Armor, Loire-Atlantique), est similaire à celle des dossiers ici évoqués. Enfin, s'agissant du point 3), la commission note que Madame X souhaite consulter des dossiers issus de la direction départementale des renseignements généraux, s'étendant de 1945 à 1993, contenant soit des synthèses sur la situation démographique et les conditions de vie dans le département, soit des arrêtés de reconduite à la frontière en 1991 et 1992. La commission relève qu'elle a obtenu une dérogation pour consulter d'autres dossiers émanant de cette même direction, notamment des demandes de titres de séjour, de naturalisations et des déclarations de nationalité pour la période 1985-2008, ou encore des enquêtes sur les communautés musulmanes non communicables avant 2044. La commission ne peut dès lors que s'étonner de nouveau que l'administration, d'une part accorde une dérogation pour de tels dossiers, et, d'autre part refuse l'accès à d'autres dossiers qui contiennent des informations de nature similaire et soumises aux mêmes restrictions d'accès. Au regard des dérogations déjà obtenues par Madame X, dans le département du Morbihan comme dans d'autres départements du Grand Ouest, pour des dossiers qui contenaient des informations relatives à la vie privée des individus et à l'histoire de l'immigration, la commission estime que la communication des documents ici sollicités ne porte pas d'atteintes aux intérêts que la loi entend protéger autres que celles que l'administration a déjà pu examiner et malgré lesquelles elle a néanmoins accordé une autorisation de consultation par dérogation. La commission émet par conséquent un avis favorable, en rappelant à Madame X son obligation de ne communiquer aucune information relative à la vie privée des individus ou qui porterait atteinte aux secrets définis par la loi.