Conseil 20181232 Séance du 13/09/2018

Caractère communicable à un journaliste des comptes annuels d'une fondation d’entreprise ne recevant pas de subventions publiques ni de dons dont le montant est égal ou supérieur à 153 000 euros.
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 13 septembre 2018 votre demande de conseil relative au caractère communicable à un journaliste des comptes annuels d'une fondation d’entreprise ne recevant pas de subventions publiques ni de dons dont le montant est égal ou supérieur à 153 000 euros. La commission relève, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, « Les sociétés civiles ou commerciales (...) peuvent créer, en vue de la réalisation d'une œuvre d'intérêt général, une personne morale, à but non lucratif, dénommée fondation d'entreprise. Lors de la constitution de la fondation d'entreprise, le ou les fondateurs s'engagent à effectuer les versements mentionnés à l'article 19-7 de la présente loi. ». En vertu de l'article 19-9 de cette loi, les fondations d'entreprise doivent établir chaque année un bilan, un compte de résultats et une annexe et nommer un commissaire aux comptes. Aux termes de l'article 19-10 de la même loi : « L'autorité administrative s'assure de la régularité du fonctionnement de la fondation d'entreprise ; à cette fin, elle peut se faire communiquer tous documents et procéder à toutes investigations utiles. La fondation d'entreprise adresse, chaque année, à l'autorité administrative un rapport d'activité auquel sont joints le rapport du commissaire aux comptes et les comptes annuels. ». La commission rappelle, par ailleurs, qu'aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Sont considérés comme documents administratifs, (…), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission ». Selon l’article L311-1 du même code: « Sous réserve des dispositions des articles L311-5 et L311-6, les autorités mentionnées à l'article L300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande (...) ». La commission en déduit que les comptes annuels sollicités, que vous détenez dans le cadre de votre mission de contrôle du fonctionnement des fondations d'entreprise, doivent être regardés comme des documents administratifs, soumis comme tels au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. La commission rappelle, en second lieu, d'une part, que l'article 19-8 de la loi du 23 juillet 1987 dispose que : « Les ressources de la fondation d'entreprise comprennent : 1° Les versements des fondateurs à l'exception de la dotation initiale si celle-ci a été constituée et n'a pas fait l'objet de l'affectation prévue à l'article 19-6 ; 2° Les subventions de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics ; 3° Le produit des rétributions pour services rendus ; 4° Les revenus de la dotation initiale si celle-ci a été constituée et n'a pas fait l'objet de l'affectation prévue à l'article 19-6 et des ressources mentionnés aux 1°, 2° et 3° ci-dessus. Sous peine de retrait de l'autorisation administrative prévue à l'article 19-1, la fondation d'entreprise ne peut faire appel à la générosité publique ; elle ne peut recevoir de dons ni de legs. Elle peut toutefois recevoir des dons effectués par les salariés, mandataires sociaux, sociétaires, adhérents ou actionnaires de l'entreprise fondatrice ou des entreprises du groupe, au sens de l'article 223 A du code général des impôts, auquel appartient l'entreprise fondatrice. » Elle rappelle, d'autre part, qu'il résulte de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 que le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention, la convention qui doit être obligatoirement conclue lorsque la subvention dépasse 23 000 euros, et le compte rendu financier de la subvention doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande par l'autorité administrative ou l'organisme chargé de la gestion d'un service public industriel et commercial mentionné au premier alinéa de l'article 9-1 ayant attribué la subvention ou par les autorités administratives qui détiennent ces documents, dans les conditions prévues par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. L'avant-dernier alinéa de l'article 10 de la loi du 12 avril 2000 précise que les fondations sont également soumises aux obligations de publicité prévues pour les associations au premier alinéa de l'article L612-4 du code de commerce. Il résulte de cette dernière disposition que les fondations ayant reçu des autorités administratives, une subvention dont le montant global dépasse 153 000 euros, doivent établir des comptes annuels comprenant un bilan, un compte de résultat et une annexe et doivent assurer la publicité de leurs comptes annuels et du rapport du commissaire aux comptes. En l'espèce, la commission relève que vous lui avez indiqué que la Fondation Louis Vuitton n'a reçu aucune subvention publique ni don. Elle en déduit que cette fondation n'est pas soumise aux dispositions mentionnées plus haut qui organisent la publicité des comptes des associations ou fondations bénéficiant de subventions publiques ou de dons. La commission rappelle ensuite que le Conseil d'Etat, dans sa décision n° 344924 du 17 avril 2013, a jugé que le II de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, désormais codifié au 1° de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, garantit la protection de la vie privée à toute personne, tant physique que morale. Elle estime, à cet égard, que la communication des comptes de la Fondation Louis Vuitton que vous avez recueillis dans le cadre du contrôle que vous exercez, serait de nature à révéler des informations économiques et financières et par là même des choix révélateurs de l'organisation, des actions et des projets de la fondation de nature à porter atteinte au secret de la vie privée de cette personne morale de droit privé. La commission en conclut que ce document n'est pas communicable à des tiers.