Avis 20180755 Séance du 14/06/2018

Communication de l'avis émis par la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) justifiant du refus d'habilitation confidentiel défense qui a été opposé à son client le 29 juin 2017.
Maître X, conseil de Monsieur X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 9 février 2018, à la suite du refus opposé par la ministre des armées à sa demande de communication de l'avis émis par la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) justifiant du refus d'habilitation confidentiel défense qui a été opposé à son client le 29 juin 2017. La commission rappelle d’abord que l’article 413-9 du code pénal prévoit que « présentent un caractère de secret de la défense nationale (…), les documents, informations, (…) intéressant la défense nationale qui ont fait l’objet de mesures de classification destinées à restreindre leur diffusion ou leur accès » et que l’article R2311-6 du code de la défense dispose : « Dans les conditions fixées par le Premier ministre, les informations et supports classifiés au niveau Secret-Défense ou Confidentiel-Défense, ainsi que les modalités d'organisation de leur protection, sont déterminés par chaque ministre pour les administrations et les organismes relevant de son département ministériel ». Il résulte de ces dispositions que ne peuvent être réputés présenter un caractère de secret de la défense nationale que les renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers intéressant la défense nationale qui ont fait spécialement l'objet d'une classification par l'autorité compétente dans les conditions prévues par le code de la défense (CE 25 mai 2005, Assoc. Reporters sans frontières et a., n° 260926, Rec. Lebon T. 707). En outre, selon l’article 4 de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale, approuvée par un arrêté du Premier ministre du 30 novembre 2011, « la décision de classifier au titre du secret de la défense nationale une information ou un support a pour conséquence de le placer sous la protection de dispositions spécifiques du code pénal. L'apposition du marquage de classification constitue le seul moyen de conférer cette protection particulière. » La commission rappelle que le secret des documents classifiés au titre du secret de la défense nationale en application de l'article 413-9 du code pénal revêt le secret d'un caractère protégé par la loi, au sens du h du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration. En outre, en vertu du b du même 2°, ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte au secret de la défense nationale, même quand ils ne sont pas classifiés, pendant le délai de cinquante ou cent ans fixé au 3° du I de l'article L213-2 du code du patrimoine et au deuxième alinéa du 5° de ce I, à l'exception des documents dont la communication est susceptible d'entraîner la diffusion d'informations permettant de concevoir, fabriquer, utiliser ou localiser des armes nucléaires, biologiques, chimiques ou toutes autres armes ayant des effets directs ou indirects de destruction d'un niveau analogue (armes dites « de destruction massive »), qui ne sont jamais communicables. La commission rappelle toutefois qu’aux termes de l’article L340-1 du code des relations entre le public et l’administration, elle est « chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques » . Elle est ainsi compétente pour rendre un avis, sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l’administration, sur la communication de documents administratifs couverts par le secret de la défense nationale (CE, 20 février 2012, Min. de la défense, n°350382, Rec. Lebon p. 54). L'article R343-2 du code prévoit par ailleurs que « l'administration mise en cause est tenue, dans le délai prescrit par le président de la commission, de communiquer à celle-ci tous documents et informations utiles et de lui apporter les concours nécessaires. (...) ». La commission rappelle ainsi, en premier lieu, qu’elle a indiqué dans son avis n° 20153938 du 19 novembre 2015 qu'à moins que les informations dont elle dispose ne fassent apparaître que la communication du document, quelle que soit sa classification, porterait en tout état de cause atteinte au secret de la défense nationale, il lui appartient dans ce cadre de vérifier qu'avant que ne soit refusée la communication du document sollicité, qui ne serait possible qu'après déclassification par l'autorité compétente, celle-ci s'est assurée que le maintien de la classification est justifié et en particulier qu’une déclassification partielle du document ne peut être réalisée. La commission rappelle, en second lieu, qu’elle a précisé dans son avis n° 20124117 du 10 janvier 2013, qu’elle se prononce alors au vu, notamment, de tout élément d'information que l'administration destinataire de la demande lui communique dans des formes préservant le secret de la défense nationale, de façon à lui permettre d'émettre son avis en connaissance de cause sans porter directement ou indirectement atteinte à ce secret. Dans le cas où, estimant que la communication d'un document classifié ne porterait atteinte ni au secret de la défense nationale, ni à un autre intérêt protégé par l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, la commission émettrait un avis favorable à la demande, il appartiendrait à cette administration d’engager les procédures nécessaires en vue de la déclassification, totale ou partielle, de ce document par l'autorité compétente. En l’espèce, la commission relève que Monsieur X a fait l’objet d’une procédure d’habilitation. Elle rappelle qu’aux termes de l’article 19 de l'instruction générale interministérielle n° 1300 sur la protection du secret de la défense nationale, approuvée par un arrêté du Premier ministre du 30 novembre 2011 : « En vertu de l'article R. 2311-7 du code de la défense, nul n'est qualifié pour connaître des informations ou supports classifiés s'il n'est habilité au niveau requis et s'il n'a le besoin de les connaître. ». Selon l’article 25 de cette même instruction, la décision d'habilitation ou de refus d'habilitation est prononcée par l'autorité d'habilitation au regard des conclusions du service enquêteur et lorsque l’habilitation est refusée, l'intéressé est informé de la décision défavorable prise à son endroit. Un refus d'habilitation n'a pas à être motivé lorsqu'il repose sur des informations qui ont été classifiées. Enfin aux termes de l’article 26 : « Si le candidat sollicite, par l'exercice d'un recours, une explication du rejet de la demande d'habilitation, il obtient communication des motifs lorsqu'ils ne sont pas classifiés. Lorsqu'ils le sont, le candidat se voit opposer les règles applicables aux informations protégées par le secret. » En réponse à la demande qui lui a été adressée, le ministre des armées a informé la commission que le document sollicité était couvert par le secret de la défense nationale et qu’à ce titre, il ne pouvait pas être communiqué en application des dispositions du b) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration. Il a également précisé que l’instruction de la demande de communication présentée par Monsieur X a conduit au réexamen de la nécessité de cette classification mais que le risque de révélation de méthodes ou de sources du service chargé de l’enquête s’opposait encore à sa déclassification. La commission, qui comprend de la réponse du ministre que le document sollicité ne peut être communiqué au demandeur après occultation ou disjonction des mentions protégées par le secret de la défense nationale ou que ces occultations priveraient d'intérêt la communication, estime, en l’état des informations dont elle dispose, que la communication du document demandé porterait atteinte au secret de la défense nationale couvert par le b) du 2° du I de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration en révélant les méthodes ou les sources du service ayant procédé à l’enquête . Elle émet, dès lors, un avis défavorable.