Avis 20180237 Séance du 03/05/2018

Communication du document, relatif à la rémunération du président-directeur général de l'Agence, précisant notamment les informations suivantes : 1) le salaire fixe ; 2) les éléments variables ; 3) les éventuels revenus annexes liés à ses responsabilités ; 4) l'évolution de son salaire et des éléments variables depuis son arrivée à la tête de l'Agence en 2010 ; 5) ses conditions de départ, dans le cas du non renouvellement de son mandat en 2018.
Monsieur X, délégué syndical SUD-AFP, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 8 janvier 2018, à la suite du refus opposé par le président de l'Agence France-Presse à sa demande de communication du document, relatif à la rémunération du président-directeur général de l'Agence, précisant notamment les informations suivantes : 1) le salaire fixe ; 2) les éléments variables ; 3) les éventuels revenus annexes liés à ses responsabilités ; 4) l'évolution de son salaire et des éléments variables depuis son arrivée à la tête de l'Agence en 2010 ; 5) ses conditions de départ, dans le cas du non renouvellement de son mandat en 2018. La commission rappelle, à titre liminaire, qu’elle n’est pas compétente pour se prononcer sur le droit d’information que les représentants du personnel et les organisations syndicales peuvent tirer, en cette qualité, de textes particuliers. Ces derniers peuvent en revanche se prévaloir, comme tout administré, du livre III du code des relations entre le public et l'administration et des régimes particuliers énumérés aux articles L342-1 et L342-2 de ce code pour obtenir la communication de documents. Après avoir pris connaissance de la réponse du président-directeur général de l'Agence France-Presse à la demande qui lui a été adressée, la commission rappelle qu'au sens de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978, désormais codifié à l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, le Conseil d’État a jugé, dans sa décision du 22 févr. 2007, n° 254641, Assoc. du personnel relevant des établissements pour inadaptés, que sont regardés comme chargés de la gestion d’un service public les organismes qui assurent une mission d’intérêt général sous le contrôle de l’administration et qui sont dotés à cette fin de prérogatives de puissance publique ainsi que, en l’absence de telles prérogatives, ceux pour lesquels il apparaît qu’eu égard à l’intérêt général de leur activité, aux conditions de leur création, de leur organisation ou de leur fonctionnement, aux obligations qui leur sont imposées ainsi qu’aux mesures prises pour vérifier que les objectifs, qui leur sont assignés, sont atteints, l’administration a entendu leur confier une telle mission. La commission relève qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 10 janvier 1957 portant statut de l'agence France-Presse (AFP), l'agence est « un organisme autonome doté de la personnalité civile et dont le fonctionnement est assuré suivant les règles commerciales » qui a pour objet « 1° de rechercher, tant en France qu'à l'étranger, les éléments d'une information complète et objective ; 2° de mettre contre payement cette information à la disposition des usagers. » L'activité de l'Agence France-Presse est, selon l'article 2 de la même loi, soumise aux obligations fondamentales suivantes : « 1° L'Agence France-Presse ne peut en aucune circonstance tenir compte d'influences ou de considérations de nature à compromettre l'exactitude ou l'objectivité de l'information ; elle ne doit, en aucune circonstance, passer sous le contrôle de droit ou de fait d'un groupement idéologique, politique ou économique ; 2° L'Agence France-Presse doit, dans toute la mesure de ses ressources, développer son action et parfaire son organisation en vue de donner aux usagers français et étrangers, de façon régulière et sans interruption, une information exacte, impartiale et digne de confiance ; 3° L'Agence France-Presse doit, dans toute la mesure de ses ressources, assurer l'existence d'un réseau d'établissements lui conférant le caractère d'un organisme d'information à rayonnement mondial. » Le Conseil d’État a été amené à se prononcer sur la nature juridique de l’Agence France-Presse et a considéré, dans un avis du 10 juin 2004, qu’il résultait de l’ensemble des dispositions de la loi du 10 janvier 1957, rapprochées des termes de l’exposé des motifs et éclairées par les travaux parlementaires que l’agence présentait le caractère d’un organisme de droit privé sui generis. La commission constate l’indépendance, tant à l’égard de l’État que des intérêts privés, de l’agence, dont la direction est confiée à un conseil d’administration composé des représentants des usagers et du personnel dans lequel l’État, par l’intermédiaire des sociétés nationales de programme ne compte que deux membres sur dix-huit, avec un conseil supérieur chargé d’assurer l’indépendance et le respect des obligations de l’agence ainsi qu’une commission financière, comprenant deux membres de la Cour des comptes, chargée de contrôler sa gestion financière mais relève que l’État lui verse, en application de l'article 13 de la loi du 10 janvier 1957, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-433 du 17 avril 2015 portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, une compensation financière des coûts net générés par l'accomplissement de ses missions d'intérêt général, telles que définies aux articles 1er et 2 de cette loi et qu'est conclu entre l'agence et l’État un contrat d'objectifs et de moyens qui décline précisément les missions confiées à l'agence en cinq objectifs : assurer l'existence d'un réseau d'établissements dense, c'est-à-dire d'avoir une portée globale, garantir le caractère permanent de la collecte et du traitement de l'information, produire une information complète pour les usagers français et étrangers, fournir une information exacte, impartiale et digne de confiance et diffuser de l'information régulière et sans interruption. La commission constate, enfin, que la compensation des missions d'intérêt général exercées par l'agence représente un tiers de ses ressources budgétaires. La commission en déduit que l'AFP doit être regardée comme une personne de droit privé chargée d’une mission de service public, au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, et que les documents produits ou reçus dans le cadre de cette mission de service public sont considérés comme documents administratifs. Elle estime également qu'eu égard au rôle dévolu au président-directeur général de l'agence, qui est chargé aux termes de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1957 « de la préparation et de l'exécution des délibérations du conseil d'administration, de la direction de l'ensemble des services de l'agence et de la représentation de celle-ci », quant à la définition et la mise en œuvre des missions de service public dont l'AFP est chargée et aux caractéristiques de la gouvernance de l'agence tenant notamment à son indépendance, doivent être regardés comme présentant un lien suffisamment direct avec ces missions de service public pour qu'ils soient qualifiés d’administratifs, les documents qui se rapportent à la rémunération de son président-directeur général et que la commission soit, par suite, compétente pour connaître des demandes d’accès qui s’y rapportent. La commission considère, en conséquence, que l’ensemble des documents sollicités sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration. En application des dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration, cette communication doit toutefois s’effectuer sous réserve de l'occultation préalable de toutes les mentions dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée de la personne concernée (par exemple la date et le lieu de naissance, l'adresse personnelle, la situation familiale) ainsi que celles révélant une appréciation ou un jugement de valeur la concernant. Tel serait le cas, d’une part, d’une rémunération contractuelle arrêtée d’un commun accord entre les parties, sans être déterminée par des règles régissant l’emploi en cause et, d’autre part, des éléments de rémunération liés à la façon de servir de l'intéressé, notamment les primes de rendement, les primes pour travaux supplémentaires ou le montant total des rémunérations si la communication de ce montant permet de déduire celui des primes liées à la manière de servir. La commission émet, dès lors, un avis favorable à la demande en application des dispositions de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous les réserves qui viennent d'être rappelées.