Avis 20145046 Séance du 22/01/2015

Communication des documents suivants : 1) les éléments synthétiques relatifs aux récentes attaques de loups commises dans le département du Var ; 2) un tableau chronologique des attaques constatées par commune et par éleveur (comportant la localisation de l'éleveur).
Monsieur X X, pour l'association syndicale autorisée de Signes, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 19 décembre 2014, à la suite du refus opposé par le directeur départemental des territoires et de la mer du Var à sa demande de communication des documents suivants : 1) les éléments synthétiques relatifs aux récentes attaques de loups commises dans le département du Var ; 2) un tableau chronologique des attaques constatées par commune et par éleveur (comportant la localisation de l'éleveur). La commission rappelle qu’en vertu des 1°) et 3°) de l’article L124-2 du code de l’environnement, sont notamment considérées comme étant relatives à l’environnement, les informations qui ont pour objet l’état de la diversité biologique ainsi que celles se rapportant aux conditions de vie des personnes lorsqu’elles sont ou peuvent être altérées par les éléments de l’environnement. Elle relève, par ailleurs, que le loup fait partie de la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire national, qui a été établie par arrêté du 23 avril 2007, pris en application des dispositions des articles L411-1 et suivants du code de l’environnement. Elle estime, dans ces conditions, que les documents demandés – qu’il s’agisse tant d'éléments synthétiques relatifs aux attaques de loup dans le Var que du tableau chronologique des attaques constatées par commune et par éleveur – doivent être regardés, au sens des dispositions précitées, comme comportant des informations environnementales, soumises au droit d'accès prévu par l’article L124-1 du code de l’environnement, sous réserve de la protection des intérêts énoncés au I. de l’article L124-4 du même code. La commission relève que le demandeur agit pour le compte d'une association syndicale autorisée, qui est un établissement public à caractère administratif et, donc, une autorité administrative au sens de la loi du 17 juillet 1978. La commission rappelle cependant qu'en vertu de l'article L124-1 du même code : « Le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues, reçues ou établies par les autorités publiques mentionnées à l'article L124-3 ou pour leur compte s'exerce dans les conditions définies par les dispositions du titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, sous réserve des dispositions du présent chapitre ». La commission observe que la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2003, concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, pour la transposition de laquelle les dispositions des articles L124-1 et suivants ont été introduites dans le code de l'environnement, garantit un droit d'accès aux informations relatives à l'environnement à tout « demandeur », défini comme « toute personne physique ou morale ». Cette directive n'exclut donc pas qu'une autorité administrative puisse avoir la qualité de demandeur et se prévaloir des dispositions nationales encadrant le droit d'accès à ces informations. Dans ces conditions, la commission considère que le demandeur peut se prévaloir des articles L124-1 et suivants du code de l'environnement. Elle s'estime donc compétente pour se prononcer sur cette demande. En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur départemental des territoires et de la mer du Var a informé la commission de ce que les documents sollicités n'existaient pas. La commission rappelle que le Conseil d'État a dégagé le principe selon lequel le droit à communication posé par l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 ne s'applique qu'à des documents existants et que, par conséquent, l'administration n'est tenue, en règle générale, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la communication d'un dossier qui n'existe pas en tant que tel, ni de faire des recherches en vue de collecter l'ensemble des documents éventuellement détenus, ni d'établir un document en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités. Elle relève toutefois que le régime particulier prévu par le chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l’environnement porte, à la différence du régime général d'accès aux documents administratifs, sur les « informations » et non uniquement sur les documents relatifs à l’environnement. Elle en déduit que dès lors que l’administration détient de telles informations, figurant ou non sur un document existant, elles sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L124-3 de ce code, ce dernier n’imposant aucune exigence de formalisation préalable de l'information demandée, et qu’il appartient alors à l’administration, saisie d’une demande en ce sens, d’élaborer un document comportant les informations sollicitées. Par ailleurs, le directeur départemental des territoires et de la mer du Var informe la Commission de ce que les données relatives aux attaques de loup, en particulier le bilan des attaques et des victimes par département pour 2012, 2013 et 2014, ainsi qu'une carte de répartition des attaques par commune pour 2013, sont portées à la connaissance du public sur le site officiel « www.loup.developpement-durable.gouv.fr ». La commission relève toutefois que les informations mentionnées sur ce site ne comportent que le nombre de constats et de victimes constatées annuellement au sein du département du Var. Elle estime que ces informations ne répondent pas à la demande de M. X. La commission rappelle ensuite que, si le 2°) du I de l’article L124-4 du code de l’environnement prévoit que l’autorité publique peut rejeter une demande d’information relative à l’environnement dont la consultation ou la communication pourrait porter atteinte à la protection de l’environnement auquel elle se rapporte, un tel refus de communication ne peut être opposé qu’après avoir apprécié l’intérêt que présenterait, à l’inverse, cette communication. En l'espèce, la commission considère que la communication des informations sollicitées, en particulier celles mentionnées au point 2) de la demande, peut être de nature à porter atteinte à la préservation des loups présents dans le département, en révélant, par l’indication des lieux précis des attaques (communes et exploitations concernées), des indices qui pourraient permettre leur localisation. Elle estime que la conciliation prévue par ces dispositions entre, d’une part, les intérêts qu’elles protègent, et d’autre part, l’intérêt d’une communication, doit conduire l’administration à substituer, le cas échéant, aux informations demandées d’autres indications moins précises (par exemple par canton), qui seraient de nature à garantir la protection de l’environnement et à préserver les autres intérêts garantis par la loi, tout en répondant à la demande. La commission estime enfin que les informations sollicitées sont communicables au demandeur sous réserve de l'occultation, en application du 1°) du I. de l’article L124-4 du code de l’environnement, des mentions dont la communication porterait atteinte à la vie privée des éleveurs concernés ou éventuellement, au secret en matière industrielle et commerciale. La commission émet, donc, un avis favorable à la communication des informations visées aux points 1) et 2) de la demande, sous les réserves précédemment énoncées.