Conseil 20081905 Séance du 22/05/2008

- caractère communicable à M. Fabrice BURGAUD, magistrat, des documents suivants : 1) rapport de janvier 2007 portant sur « le rôle des acteurs extérieurs à l'autorité judiciaire dans l'affaire dite d'Outreau » ; 2) rapport de mai 2007 portant sur « le rôle des services de santé dans l'affaire dite d'Outreau ».
La commission d'accès aux documents administratifs a examiné, dans sa séance du 22 mai 2008, votre demande de conseil relative au caractère communicable à Monsieur B., magistrat, du rapport de janvier 2007 portant sur « le rôle des acteurs extérieurs à l'autorité judiciaire dans l'affaire dite d'Outreau » et du rapport de mai 2007 portant sur « le rôle des services de santé dans l'affaire dite d'Outreau ». La commission relève, en premier lieu, que ces deux rapports, établis par l’IGAS, conjointement avec d’autres services d’inspections (rapport de janvier 2007) ou seule (rapport de mai 2007), sont des documents administratifs soumis, à ce titre, au droit d’accès garanti par la loi du 17 juillet 1978. Leur communication s’apprécie donc normalement au regard de ces dispositions. La commission prend note, en deuxième lieu, que la demande de communication adressée par Monsieur B. intervient dans le cadre d’une procédure disciplinaire, actuellement pendante, engagée à son encontre par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). La commission rappelle que la communication des pièces versées dans le cadre d’une telle procédure s’effectue, non sur le fondement de la loi de 1978, mais dans le respect des règles particulières relatives aux droits de la défense et au principe du contradictoire. En revanche, dès l’achèvement de la procédure disciplinaire, l’ensemble des pièces auxquelles un agent public a normalement eu accès dans ce cadre, lui sont à nouveau communicables de plein droit sur le fondement de l’article 2 et du II de l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978. Le déroulement de la procédure disciplinaire ne fait toutefois pas obstacle à l’application des dispositions de cette dernière loi pour l’ensemble des documents qui, comme c’est le cas s’agissant des deux rapports de l’IGAS, ne figurent pas au nombre des pièces versées dans la procédure disciplinaire. La commission indique, en troisième lieu, que le I. de l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978 permet de refuser la communication des documents administratifs au cas où cette communication porterait atteinte au « déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d’opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée de l’autorité compétente ». La commission considère que ces dispositions sont applicables dès lors que le CSM revêt un caractère juridictionnel lorsqu’il statue, comme c’est le cas en l’espèce, en qualité de conseil de discipline des magistrats du siège (CE Ass., 12 juillet 1969, E., Rec. p. 388). La commission rappelle, cependant, que cette restriction au droit d’accès ne trouve à s’appliquer que lorsque la transmission des documents sollicités est de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, à retarder le jugement de l’affaire ou à compliquer l’office du juge. Elle considère qu’une telle restriction ne paraît pas justifiée au cas présent. L’examen des deux rapports révèle, par ailleurs, leur intérêt pour restituer le cadre et les modalités d’intervention des services publics, en particuliers sociaux et de police, au moment de l’affaire dite d’Outreau. La présentation des structures et dispositifs existants en matière de prise en charge de l’enfance en danger ainsi que les modalités de signalement et de recueil de la parole des enfants sont susceptibles d’apporter d’utiles éclairages dans le cadre de la procédure engagée, sans lui porter une quelconque atteinte. Tout en relevant le caractère impersonnel de très nombreux passages des deux rapports et leur neutralité s’agissant des fonctionnaires et agents publics nommément désignés, la commission rappelle néanmoins que leur communication doit s’effectuer, sous réserve, en application du II. de l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978, de l’occultation de diverses mentions. Il s’agit en particulier des mentions susceptibles de porter atteinte au secret de la vie privée et des dossiers personnels ainsi qu’au secret médical, portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique ou faisant apparaître le comportement d’une personne dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. En ce qui concerne le rapport portant sur le rôle des acteurs extérieurs à l'autorité judiciaire, il n’est pas nécessaire d’occulter les identités des agents publics mentionnés, dès lors que les observations formulées concernent l’exercice de leurs fonctions au sein des administrations ou des services publics. Il importe, toutefois, en application des principes sus rappelés, d’occulter aux pages 65 et 66 du rapport les noms des assistantes maternelles auxquelles pourrait être reprochée « une forme d’entorse aux recommandations de neutralité » selon les termes mêmes de ce rapport. Il convient, de manière générale, d’occulter les coordonnées personnelles (en particulier, éléments d’état civil, adresse, situation familiale et, le cas échéant, professionnelle) des mineurs et des adultes acquittés ou condamnés dans le cadre du procès d’Outreau, ou un temps poursuivis ou gardés à vue dans le cadre de cette affaire, ainsi que tous les éléments permettant, en l’espèce, de les identifier. En ce qui concerne le rapport portant sur le rôle des services de santé, il convient de procéder aux mêmes occultations nominatives, beaucoup moins nombreuses que dans le rapport précédent. Il ne paraît pas nécessaire, en revanche, de masquer les noms des spécialistes médicaux extérieurs à l’affaire et dont les travaux sont cités pour éclairer les modalités de détection et de prise en charge des enfants victimes d’abus. Au bénéfice de ces observations, la commission estime que sous réserve de l’occultation préalable des informations non communicables à des tiers mentionnées ci-dessus, les deux rapports de l’inspection sont communicables à Monsieur B.